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Star Wars & philo de supermarché


Re: Retour à... Pleasantville -- Claude Mac Duff
Postée par Gaël , May 10,1999,18:12 Index  Forum

Le point que tu soulève, à propos des délires philosophiques sur Starwars, est intéressant. Justement, dans le "que sais-je" (Presses Universitaires de France) consacré à l'ésotérisme, écrit par Antoine Faivre, Directeur d'études à l'Ecole pratique des Hautes études (section science religieuses) et auteur depuis 30 ans d'une dizaine d'ouvrages sérieux (historiques, non-crédules) sur l'ésotérisme et l'alchimie, on peut lire dans le chapitre consacré aux rapport entre cinéma et ésotérisme : "Sur le cinéma il y aurait peu à dire, sauf à considérer les éxègèses ésoterisantes que les films peuvent inspirer. L'esotérisme explicite est relativement rare. En 1920 Henrik Galeen utilise dans Der Golem le thème qui venait d'inspirer Meyrink, mais il s'agit surtout de fantastique, plus que dans le roman et dans la tradition ésotérique juive du Golem. Le cinéma peut représenter un occultisme explicite, mais il se prète mal à l'expression de cette forme de pensée qu'est l'ésotérisme, sinon en usant de moyen détournés, par exemple en mettant en scène des parcours iniatiques (ainsi dans Meetings with Remarkable Men, de Peter Brook, 1978). Relevons tout de même les titres de quatre belles oeuvres à fortes connotations alchimiques auxquelles se mêlent d'autres références de type ésotérique : 2001, A Space Odyssey (Kubrick, 1978); Excalibur (Boorman, 1983); Highlander (Mulcahy, 1986); le célèbre Star Wars (Lucas, 1977) et les suites qu'il a inspiré."

J'ai été amusé de trouver dans une publication honorable, sous la plume d'un auteur sérieux, des considérations aussi étrangement décalées. Excalibur et 2001, d'accord, mais les références à Star Wars et surtout à Highlander sont particulièrement dérisoires. Il eut été plus judicieux de citer l'adaptation de Jodorowksy du roman de Thomas Mann, "la Montagne Magique"; ou encore le génial "les ailes du désir" de Wenders. Enfin je suppose que l'auteur s'est volontairement limité aux oeuvres les plus connues - c'est vrai après tout pourquoi parler d'un obscur film de Jodorowsky que personne n'a vu quand on a Star Wars sous la main ?

Cependant, il est vrai qu'il y a dans Star Wars une thématique très ésotérique - je n'irais pas jusqu'à dire philosophique, où alors seulement en parlant de philosophie de bazar. Et que cette thématique n'est pas une simple accroche à spectateurs mal intégrée dans l'histoire, mais bien un élément important et très réfléchi du scénario. Alors au fond pourquoi ne pas s'en servir comme base pour des discussions sérieuses ? Après tout Star Wars n'est qu'une fable philosophique moderne, mais très bien structurée, qui parle d'initiation, de cheminements et d'erreurs, de rédemption, et qui a trouvé des incarnations idéales pour bon nombres d'archétypes que chacun peut reconnaître. Comme toute fable philosophique, elle est très naïve. Mais pas plus que les anectodes dont fourmillent les ouvrages taoistes, qui cachent pourtant une grande subtilité derrière leur simplicité apparente. En tout cas Star Wars est une parabole bien moins basique que celles de Jesus, le spécialiste ès paraboles.
Si monter des réflexions philosophiques à partir de Star Wars peut amener à s'intéresser à la philo des personnes qui jamais ne s'en seraient approché sinon, tant mieux. Je suis pour. C'est le but de tout conte philosophique : non d'énoncer une vérité (sauf pour le lecteur paresseux ou trop influençable) mais d'initier une réflexion, sous un angle qui la rende attrayante.


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