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La nature aurait-elle perdu la touche ?


Re: Questions nuageuses -- Noé
Posted by Évariste , Sep 19,2001,23:35 Index  Forum

NOÉ :

«Il serait beaucoup plus juste de reconnaître, dés le départ, que les CONDITIONS, "dans la nature" comme vous dites, ont grandement varié dans l'histoire de la planète.»

ÉVARISTE : je laisse la parole à Jean Rostand...

JEAN ROSTAND :

* * * * *

«J’ai assez dit, je crois, que la nature m’est bien trop vaste pour que je pusse jamais éprouver le besoin de lui ajouter quelque chose ; mais je croirais volontiers que la matière d’où jadis sortit la vie différait essentiellement de la matière d’aujourd’hui, tout comme la vie primitive devait différer essentiellement de la vie élémentaire des micro-orgnismes d’aujourd’hui en ce qu’elle était capable d’engendrer tout le règne vivant, alors que ces micro-organismes ne savent que se reproduire eux-mêmes. En bref, je tiendrais assez volontiers la matière actuelle pour vidée de son pouvoir biogène, j’y verrais une sorte de «matière morte» si l’on peut s’exprimer ainsi, une matière où nous ne retrouverions qu’une image très appauvrie de ce qu’était la matière primitive.

«On ne peut s’empêcher de remarquer que les phénomènes de genèse – genèse de la vie, genèse des espèces – paraissent absents du monde qui nous entoure. N’y aurait-il pas une cause commune à ces agénésies ? Ne seraient-elles pas en rapport avec tout l’état présent du cosmos ? N’oublions pas que celui-ci a sans cesse changé de dimensions et de propriétés, qu’il s’est modifié sans cesse dans sa texture intime. Sans qu’il soit possible pour le moment de préciser davantage, je serais enclin à croire que les grandes démarches de la vie sont liées à l’évolution générale de l’univers.»

(«Ce que je crois», Grasset, 1953 et 1956, page 47.)

* * * * *

Ainsi, Noé, Jean Rostand partageait votre opinion peut-être même avant votre naissance ;-)

Voici, en prime, cet autre beau texte de Rostand :

* * * * *

«D’une foule de circonstance -- climatiques, biologiques et autres – dépendaient la réussite de l’homme, et si la conjoncture eût été différente, la terre, sans doute, eût connu un autre roi. Il est permis de penser que des lignées furent précocement interrompues, qui eussent pu conduire à des formes supérieures à la nôtre. Dans l’immense fouillis de l’animalité, il fallait bien qu’il y eût un meilleur, un «premier». Ce premier, c’est nous qui le sommes, et c’est tout ce que nous avons le droit de dire de nous-mêmes.»

(«Ce que je crois», Grasset, 1953 et 1956, page 49)

* * * * *

P.-S. : Ces textes pourraient aussi donner des munitions à Julien...

Évariste


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