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Postée par Stéphane , Mar 03,2000,09:59 Index  Forum

Moi non plus je ne comprends pas tout à fait. Êtes-vous en train de nous dire que le transcendant est une réalité non-scientifique? Pour moi c'est une contradiction des termes. En y pensant une seconde, il n'y a pas de raison de conclure que ce qui «transcende» nos sens et notre compréhension soit nécessairement, immédiatement divin. Ce serait là gravement sur-estimer nos capacités. Je crois qu'il serait plus raisonnable de supposer (s'il faut absolument supposer quelque chose: personnellement je ne vois pas du tout l'importance de la question) que certains pans de la réalité nous échappent jusqu'à présent que de supposer qu'on comprenne absolument tout, jusqu'à la limite divine.

Au contraire, si le «transcendant» est une catégorie d'expérience (et donc, d'interprétation) plutôt qu'une catégorie de fait, tout rentre dans l'ordre et effectivement je ne crois pas qu'il s'agisse là d'un sujet intéressant pour un débat sceptique--en partie parce qu'ainsi les sceptiques ont gagné d'avance.

Quant à la religion, c'est le système de language et de rituel qui permet d'effacer la distinction expérience/fait pour produire un contrôle politique. Elle efface la distinction en offrant un language tout prêt pour décrire l'expérience transcendante (ce qui est la définition même de «superstition»: créer une narration autour d'une incompréhension ou d'un manque de contrôle). Est-ce que les sceptiques devraient éviter de la questionner? En supposant que la politique devrait idéalement se baser sur des faits (on peut bien rêver), il me semble que moins il s'y trouvera de «transcendant» mieux on se portera. Il est donc parfaitement sceptique de disputer les vérités offertes dans des déguisements divins s'il s'agit pour leur promoteurs de les mettre en pratique dans l'administration (je ne dis rien de nouveau, là, tout de même, et JF a déjà écrit tout ça). Et attention, le contrôle politique ce n'est pas simplement de donner des ordres.

Thomas d'Acquin, connu surtout pour son extraction du pire de l'éthique de Platon et d'Aristote, ne m'impressionne pas du tout en tant que patrimoine intellectuel de la chrétienté. Au contraire, dans une société démocratique, ce sont les sophistes qu'on devrait admirer, mais leur nom a trop été traîné dans la boue--justement par les dogmatiques chrétiens comme Thomas.

Vous avez raison, la foi n'est pas seulement «bête crédulité». La plupart des religions ont réussi à convaincre à peu près tout le monde qu'il y a dans la nature humaine un «besoin» de spiritualité, et de spiritualité organisée dans la plupart des cas. Ce besoin, évidemment, n'est qu'un manque de compréhension et de contrôle sur la réalité sociale et sur le naturel implacable (#1: la mort) qui est effectivement notre lot à tous. Il s'agit donc de créer et de maintenir une logique (au sens large) offrant une certaine emprise sur le réel qui va maintenant de soi dans notre culture: voilà aussi pourquoi tant de gens s'agrippent à n'importe quoi quand la religion traditionnelle se fait moins convaincante. Il y a donc bien plus que crédulité, bête ou non, il y a un besoin réel--mais le même type de «besoin» que Coca-Cola ou Gap (!ceux qui savent ce que «gap» veut dire...) réussissent également à créer.