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Re:Mythe du libre-arbitre...


Re: Mythe du libre-arbitre... -- Khayman
Posté par Stéphane , Sep 01,2002,15:41 Index  Forum


«L'homme est une structure biologique et toute structure biologique ne recherche qu'une seule chose : conserver sa structure.»

Ceci est probablement faux dans le cas d'une «structure biologique» capable d'abstraction et de réflexion -- donc d'erreur -- sur sa propre action. Enfin.

«force est de constater que la société est basée, faute de mieux, sur l'existence de ce libre-arbitre. Même si je crois cette prémisse fausse, je n'en ai pas la preuve et je dois vivre dans cette société. Alors, j'essaie malgré tout d'établir une logique sur cette fausse prémisse.»

Je ne pense pas qu'il soit utile de dichotomiser entre un libre arbitre idéal ou une biologie entièrement déterminante. Surtout au niveau politique, où nous nous trouvons ici, qui n'est pas le domaine des constats mais de la volonté. La question est de savoir si on peut, et jusqu'à quel point, intervenir dans la vie des autres. Puisqu'on se pose la question, c'est donc que la bio ne nous aide pas. Par contre, ce que vous nous proposez est plutôt difficile à défendre, parce que la version «hard» du libre arbitre est évidemment fausse, malgré son utilité juridique.

De toute évidence la réalité est un brouillard tout de même assez épais, que la science, la réflexion et l'éducation permettent de faire reculer un tout petit peu. On ne se perd pas là-dedans simplement par naïveté ou stupidité. N'importe qui peut se faire arnaquer. Voilà pourquoi il y a des lois contre la publicité trompeuse, par exemple. Caveat emptor, c'est pas assez. Si votre grand-mère se fait embarquer par un homéopathe vous allez être le premier à chialer.

Votre question, donc, qui se résume à «pourquoi devrions-nous tenir la main aux crédules», suppose qu'il doive se trouver une raison indiscutable et objective pour que l'action humaine soit légitime (elle suppose également que les crédules sont comme une espèce à part, ce qui est grossièrement simpliste). Un peu comme le libéral moyen (dont un exemple hante ces jours-ci le forum et cherche à piquer son idéologie un peu partout), vous semblez croire qu'on fait ce qu'on fait parce qu'on est «obligé» «par nature» et qu'on ne devrait pas faire ce qu'on est pas obligé de faire (et pour les néo-libéraux, que le gouvernement ne devrait pas nous obliger à faire ce qu'on ne veut pas déjà faire, blah-blah et gnan-gnan...). Ainsi il n'y aurait pas de raison incontournable d'«intervenir» (au sens «soft», tout de même, il n'y a pas encore de «troupes de choc» sceptiques...) quand quelqu'un se fait monter un sapin.

Essayez plutôt cette façon de voir les choses: moi, je le fais parce que je veux le faire. Je constate qu'une approche rationnelle et empirique est souhaitable, pour toutes sortes de raisons dont on a déjà parlé, et je le dis. Je ne force personne, je ne suppose pas d'avance que les autres sont idiots, je vois bien que nous sommes tous dangereusement faillibles. C'est pas une «charité intellectuelle» élitiste, ni de la pédanterie. C'est simplement le résultat de la constatation que le savoir disparaît s'il n'est pas communiqué -- un peu comme le libre arbitre, quoi. Voyez comme on boucle la boucle: le libre arbitre est un idéal, mieux une direction qu'on ne peut emprunter qu'en augmentant son savoir. En quelque sorte j'arrive à une logique contraire à la vôtre, à partir de la même prémisse. Amusant, non?