
j’ai eu le privilège indu d’admirer d’une patience hindoue, de l’intérieur, comment se développe une preuve «soucoupe volante» et par quelle méthode pugnace. Eeeeh oui...

Je ne parle pas bien sûr des bons vieux jours d’UFO Québec, dont le mentor finit par parvenir à une conclusion sceptique et entra dans le mouvement du même nom; difficile de faire autrement, il avait développé une méthodologie exemplaire.

Non, je parle de la méthode des «purs et durs».

J’y étais. Assistons ensemble au phénomène et sentez le frisson parcourir votre épine dorsale.

Un soir de 2002, heure des zombies, le groupe éso de la Rive-Sud que l’on connaît bien, dans toute sa superbe, où j’avais des connexions, entra dans une effervescence sans précédent, ses chevaliers vite enfourchant leurs (censuré) et brandissant leurs sabres-laser. Toute la Rive-Sud mystique s’est lancée sur le clavier, vroum, pour surcharger leur site de trémulations, d’émois, de respirations presque dignes de grands moments copulatoires : trois soucoupes volantes z’énormes comme ça

Comme j’habite tout juste à côté du stade olympique, puisque je ne crains aucun danger, je crus bien faire d’aller vite les avertir de leur malheureuse erreur, quitte ensuite à devoir essuyer des larmes de contrition et supporter les blessés. Je dis :
«il y a un «rave» au stade, gang, j’entends la foutue musique jusqu’à travers mes entrailles et trois énormes spots font danser trois belles lumières dans le ciel pour la fête, pas moyen de dormir tab... Vos 3 soucoupes, c’est 3 spots fatiguants dans les nuages. Voilà. Meilleure chance la prochaine fois.»
Mais...
Stupeur! Émoi! Thriller!

La nouvelle se répandit comme une traînée de co**ards : la gang éso était sous le choc effroyable de mon message. Je fais donc partie de la CIA? Pourquoi ai-je tenté de cacher la vérité?

Giggles est un conspirateur!



Et cela, de PROUVER qu’il y avait DONC bel et bien trois soucoupes volantes en train de laver le cerveau des citoyens de l’est de Montréal, qui paraît-il ne s’en remettront jamais, et cela explique «logiquement» la pauvreté de ce quartier : ce sont la future armée d’esclaves-zombies de l’Antéchrist. Eh ben...
Que diantre! Oh ciel! Fi donc! Or ça!
Câl**se!
Je vais mener les armées de l'Antéchrist contre le château-fort du Grand Monarque en Montérégie? C'est flatteur, mais ne me surestime-t-on pas un peu?

Quelqu’un - admirons ce leste geste ou ce zeste réflexe, en tout cas - prit même la photo des trois lumières des spots, la distribua avec ferveur sur internet, «prouvant» ainsi que nous sommes visités, ce qui «prouvait donc forcément» que j’étais du «mauvais bord». Un espion des Initiés des mondes souterrains, du gouvernement des extra-terrestres sous terre. (Tching tchang tchong??)

Ce fut pour moi aussi révélateur, oh, que de mes mirhabs intérieurs le chant prophétique amplifiait! C’est donc comme ça que le phénomène se propage? Moi qui les imaginais parfois affamés, penchés interminablement sur leurs documents, travaillant comme des maigres...
Je suis donc devenu un témoin. Un témoin du quatrième type. J’avais vu, vécu, dans le réel... comment la ***nerie - hum, pardon -; comment euh... l'inouï se développe.
Essayez de calmer une foule affolée et de l’amener à raisonner... J’avais beau dire : «Plusieurs d’entre vous ont des voitures, venez donc voir vous-mêmes, c’est pas compliqué!»
Vite, l’avertissement d’un autre est venu :
«N’y allez pas, vous ne reviendrez plus jamais!»
«Il y a donc des enlèvements dans l’est de Montréal? En pleine ville?»
«Oui ma chère, ça DÉMONTRE qu’ils agissent maintenant au grand jour et que les temps de la fin sont venus».
«On a donc enfin la preuve qui nous manquait! Ceux maintenant qui diront qu'ils ne nous croient pas seront forcément les conspirateurs!»


J’ignore si deux têtes valent mieux qu’une, je n’en ai jamais eu qu’une seule; mais chose certaine, dans une hystérie de groupe, plusieurs têtes n’en valent aucune!
Contrairement aux épandages, sur les champs arides de la mauvaise foi, de rumeurs allègres me concernant, je ne participais pourtant qu’à une seule conspiration, destinée à aider un copain à dénouer le soutien-gorge (pourquoi gorge, au fait?) d’une belle pour qui son coeur battait lui aussi comme un rave de fin de soirée.
Maudit bâta** de sacr*****... Mais gardons notre flegme légendaire, tout au moins, en apparence. Car plus l'on s'agite, plus on a le pendouillard qui fouette en tous sens et c'est pas beau. Dignité. Allure. Prestance.
Pantois devant un raisonnement aussi phénoménal qui permit de passer de témoignage schizophrénique à hypothèse à certitude scientifique en quelques minutes et en se balançant de toutes les étapes méthodologiques, je venais, en effet, d’être initié. Pour être gentil, je ne dirai pas à quoi; après tout, je suis un conspirateur.



Quand méthodologie rime avec hystérie, le poème que l’on produit émet des sons douteux, qui ne sont pas sans nous rappeler l'ère des automatistes, qu'incidemment, je supporte peu, étant un vieux maudit.
Je disais ça comme ça...
Il ne restait qu’une conclusion à en tirer, qu’une brave décison à prendre, une seule responsabilité à assumer : aller au foutu rave, tant qu’à y être...
... et c'était l'fun. On m'a ramené sur Terre vers 7hres le matin.
B’soir!