Je me demande si, la plupart du temps, les tenants au paranormal ou au surnaturel ne sont pas des gens qui utilisent des bons outils pour des mauvais usages : je pense à ce qu'on appelle le "gros bon sens populaire". Je remarque, en effet, que beaucoup de tenants au paranormal et au surnaturel de mon entourage, sont ce qu'on appelle des gens "terre à terre", concrets, pragmatiques, tournés vers l'action ; tandis que les mêmes trouvent souvent qu'en revanche, je "plane", je suis abstrait, théorique, tourné vers la réflexion... On m'oppose souvent la vaine complexité de mon attitude sceptique toute en nuances subtiles et arguties, par rapport à la simplicité efficace de leur propre attitude, carrée, tranchée, frappée au coin du bon sens.
Or c'est assez paradoxal car, ayant effectué des études scientifiques (entre autres choses), les faits ont pour moi une importance toute particulière, et je ne manque pas l'occasion de citer des études expérimentales qui ont démonté telle ou telle allégation paranormale (et le plus souvent, sans le moindre effet perceptible chez les tenants

En fait, ces faits scientifiques, il faut l'avouer, ne ressemblent pas aux faits de la quotidienneté. Ils sont obtenus par respect d'un protocole précis, qui est chargé de matérialiser, finalement, une hypothèse, afin de tester cette dernière dans les meilleures conditions, sans se méprendre par des artefacts liés à des variables non-contrôlées. On est loin de la spontanéité et de la simplicité naturelle de l'expérience personnelle, laquelle est érigée en justificatif de toutes les "paranormalités". Pour ces gens-là, les expériences scientifiques font partie de ce même sac d'abstractions théoriques de haute voltige qui les rebute. Leur point commun étant qu'ils n'y comprennent que "pouic", ce qui leur suffit pour décréter que décidément, c'est fort lointain du réel, et que la meilleure et plus sûre source de la connaissance n'est autre que l'expérience personnelle (surtout si on l'a vécu soi-même) bien brute de décoffrage, comme la réalité du plancher-des-vaches... avec l'effet paradoxal de le faire quitter !
Et il est vrai que l'expérience personnelle, l'attitude dite "pragmatique", terre à terre, liée aux valeurs d'utilité, d'efficacité, de rapidité, est un outil bien rôdé, une heuristique habile, pour appréhender notre expérience habituelle, notre normalité quotidienne. De là à penser que cette attitude possède une valeur intrinsèque, universelle, absolue... il n'y a visiblement qu'un pas, qui est aisément franchi par certains. Il faut dire que pour qui n'a pas de formation scientifique très poussée (ou alors lointaine...), il est tentant, pour se rattraper, de clamer haut et fort son pragmatisme, afin de faire illusion. Par ailleurs, quand on n'a pas été confronté aux problèmes que se posent les scientifiques, on a tendance à croire que tous les problèmes se règlent de la même manière. Pourtant, pour qui n'a pas cette formation scientifique, un peu d'humilité suffirait à éviter les jugements hâtifs !
Mais j'ai remarqué que l'humilité effective était souvent inversement proportionnelle à celle qui serait normalement attendue, eu égard à sa propre situation cognitive... et on va donc juger de l'inhabituel comme l'on juge de l'habituel, et admettre, au gré des individus, toutes sortes d'entités puisées dans le grand prêt-à-
Et comme, contrairement aux "entités scientifiques", celles-ci s'accommodent bien d'une absence totale d'action mesurable, du fait de l'indétermination quasi-totale de leur comportement, ainsi que de leur immatérialité revendiqués, elles demeurent - une fois installées - indélogeables de l'esprit qu'elles auront investi, à moins d'une conversion de ce dernier aux vertus et lumières de la démarche rationnelle

Enfin, si ces prétendues "entités paranormales et surnaturelles" n'ont aucune espèce d'action concrète sur la réalité, et tâchent de se dérober à toutes les tentatives de mise en évidence rigoureuses, à proportion de la rigueur déployée, il faut bien admettre que la croyance à ces entités n'est pas, elle, dépourvue d'effets, pas toujours négatifs d'ailleurs, et même le plus souvent positifs, pour l'expérience personnelle (

Bien cordialement,
Mikaël