Salut Jocho,
Jocho a écrit :Quant à Mikaël, les deux sites que tu proposes sont intéressant... mais pour mon «mauvais œil». Celui qui voit que la philosophie analytique n'est qu'un passe temps intutile qui n'apporte rien. Une superstition.
Je sens qu'on va pas être d'accord
Jocho a écrit :Sans vouloir choqué ceux qui le sont, je rappelle que les anglais ne sont pas de bons philosophes (je ne parle même pas des américains, je n'imagine même pas les australiens).
Sur quoi bases-tu cette affirmation ?
Jocho a écrit :Je suis d'accord, les idéalistes - les créateurs de système - s'épuisent à mettre au clair ce qui n'en a pas besoin, inventent des jugements synthétiques à priori... Tout cela est peu intéressant, et n'est que théorie pure (de fait, inutile).
Ben figure-toi que, bien que j'ai une nette préférence pour la philosophie analytique, je n'irais pas jusqu'à dire qu'il n'y a rien d'intéressant chez les idéalistes. La théorie pure a son utilité, en ce qu'elle fournie (ou peut fournir) des cadres pour bien mener son esprit dans l'investigation du réel, par exemple. Ainsi, la logique, au moins à un certain niveau d'abstraction, est de la théorie pure, l'épistémologie aussi (tu ne peux pas faire de sciences si tu n'as pas préalablement défini ce que doit être, par exemple, un fait ; bien sûr, l'expérience peut t'amener à corriger cette définition du fait, mais son exercice - à l'expérience - présuppose que tu as déjà une définition, fut-elle implicite, des conditions nécessaires et suffisantes pour qu'un fait soit bel et bien un fait).
Jocho a écrit :Toutefois cette partie de la philosophie reste supérieure, et de beaucoup, à la pseudo-philosophie anglaise. L'on va croire que je suis un anti-américain primaire. Je dis, prennez les livres de philosophes anglo-saxon (Hobbes, Hume, les auteurs modernes...)
EDIT : Hume était agnostique et a même produit une critique de la "preuve" téléologique de l'existence de Dieu (le fameux argument du design/dessein qui est repris aujourd'hui de concert par les créationnistes et les IDistes), donc pour l'infiltration du christianisme chez les philosophes anglais, il faudra repasser
Jocho a écrit :et vous constaterez par vous-mêmes. Il y'a toujours cette volonté de «réduire le monde à une mécanique grossière». La philosophie y est infestée par le christianisme.
Il me semble que tes deux dernières phrases sont un peu contradictoires. Le christianisme - certaines variantes tout au moins - présuppose, il me semble, que le monde n'est pas une mécanique grossière, puisque des événements qui échappent à ce mécanisme - les miracles et certains phénomènes paranormaux - sont censés pouvoir se produire et même se produire de temps en temps. Maintenant, peut-être entends-tu par là que certains événements vont paraître miraculeux ou paranormaux pour le christianisme car sa vision du monde naturel est etriquée et austère (et donc ce qui est incompréhensible selon cette vision étriquée et austère est de facto pensé comme miraculeux ou paranormal).
Quoiqu'il en soit, je pense que tu te trompes en pensant que la philosophie analytique cherche à réduire le monde à une mécanique grossière et qu'elle serait infestée par le christianisme, même si je n'exclue pas l'idée que ça puisse être le cas d'un certain nombre de travaux en philosophie analytique, mais celle-ci est plus une question de méthode que de doctrine. Peut-être pourrait-on dire cela également de philosophes pour lesquels la philosophie analytique serait la seule façon acceptable de philosopher et pour lesquels ce ne serait pas seulement la méthode qui devrait être analytique, mais l'objet étudié. On a alors l'équivalent scientifique dans le scientisme qui pense dogmatiquement que la science a la réponse à tous les problèmes qui peuvent se poser à l'homme. On pourrait, par analogie, appeler ça de l'analytisme.
Mais ce n'est, à mon humble avis, pas le fait de tous les philosophes analytiques. Ce qui les relie, c'est la volonté d'exposer les problèmes et les raisonnements clairement, et de partir de l'analyse du langage, ce dernier étant supposé être l'expression naturelle de la pensée. On peut, bien entendu, contester ce dernier point, et je pense qu'un philosophe analytique non dogmatique concédera qu'il s'agit là surtout d'une hypothèse de travail (à moins qu'il ait de bons arguments, non analytiques si possible, voire non philosophiques, pour étayer ce point).
Jocho a écrit :Elle n'a strictement aucune profondeur, elle n'a aucun intérêt.
Attention à ne pas confondre la profondeur avec l'obscurité

L'idée selon laquelle la philosophie analytique n'aurait aucune profondeur, même si elle était peut-être pertinente à une époque, ne tient plus debout selon moi actuellement, puisque certaines branches renouent paradoxalement avec la métaphysique, l'ontologie et même la théologie. Par contre, sa clarté peut laisser supposer illusoirement qu'elle n'a aucune profondeur puisqu'en général, elle peut être comprise par le commun des mortels qui a un tant soit peu de bon sens et de logique
Quant à la question de l'intérêt de la philosophie analytique, je me contenterai de te signaler le rôle important de celle-ci dans les sciences cognitives, l'épistémologie, etc. D'une manière générale, sa clarté et sa rigueur rend bien plus aisé et fécond son dialogue avec les sciences (et avec le grand public cultivé) que pour d'autres formes de philosophie.
Jocho a écrit :La meilleure preuve accessible : la philosophie analytique ! Qu'apporte-t-elle vraiment ?
Je suis désolé de te décevoir,
Tu ne me déçois pas, étant donné que tu ne me convaincs pas
Jocho a écrit :mais c'est une philosophie pour superstitieux. J'ai quelques fois l'impression de retrouver des distinctions des philosophes -agités- chrétiens, ou christianisés.
Aller, je te fais une démonstration : je dis «je pense». Mais qui sait ? peut être que je «veux», ou je «sens». Il y'a pas mal de questions à se poser. Est-ce que quelque chose pense ? Quel est la cause, le déclencheur de l'acte ? Il faut que le «je» soit établit... Sinon «je pense» ne serait qu'une «certitude immédiate», puisque j'y ai déjà donné une série d'interprétations.. Ainsi, je me lance dans des débats métaphysiques : pourquoi crois-je à la cause et à effet ? pourquoi le «je» serait la cause de ma pensée ?
Ta "démonstration" ne critique qu'une certaine philosophie, celle du cogito cartésien. Je te ferai remarquer que :
- La philosophie analytique date du XXème siècle (en étant gentil j'irai jusqu'à en voir les prémisses dès la fin du XIXème), le cartésianisme date du XVIIème siècle. Si on peut (comme l'auteur de l'intro à la philosophie analytique dont j'ai donné le lien) rétrospectivement voir chez Descartes un précurseur de la philosophie analytique, c'est en tout cas une interprétation qui, à mon avis, n'emporterait pas l'adhésion de tous les philosophes analytiques.
- La philosophie analytique est une question de méthode, elle ne renvoit pas à une certaine doctrine. Celle-ci peut bien sûr apparaître chez certains philosophes à la suite d'une démarche analytique, mais elle ne caractérise pas cette dernière dans son essence, sinon il y aurait une philosophie analytique par auteur ou presque (on peut voir les choses ainsi, bien sûr, mais du coup on perd de vue ce qui fait l'unité de tous ces philosophes : leur méthode).
- La plupart des philosophes analytiques sont très critiques envers le cartésianisme, qui est effectivement critiquable. Je te renvois à Bouveresse (
Le mythe de l'intériorité) ou à Pouivet (
Après Wittgenstein, Saint Thomas) pour une critique (dans un style analytique) du cogito cartésien.
Jocho a écrit :Moi je te demande, qui s'intéresse à la métaphysique aujourd'hui ?
Ca revient à la mode au sein même du courant analytique, comme je te l'ai mentionné plus haut. Je te conseille la lecture de
Pascal Engel, Précis de philosophie analytique, Paris, PUF, Thémis Philosophie, 2000, à ce sujet.
Jocho a écrit :Tout cela pour déclarer, ceci est «vrai et certain». Ce «besoin de vérité», cette volonté de vérité à tout prix qui est propre aux chrétiens.
Je ne connais pas de philosophes analytiques qui prétendent être détenteurs de la vérité vraie !
Jocho a écrit :Toujours en ce qui concerne le sujet, Wittgenstein n'a effectivment pas raconté que des banalités sans intérêt.
Bon, tu dis une chose et son contraire alors
Jocho a écrit :Il a eu quelques fois une meilleure analyse de la philosophie que son époque (structuralisme). Cela dit, sans pour autant apporter des solutions dignes de ce nom.
Peut-être, ça pourrait faire l'objet d'un débat, analytique et non-analytique d'ailleurs

Mais tu remarqueras que Wittgenstein lui-même était très modeste, c'est surtout ses successeurs et commentateurs qui l'ont érigé sur un piedestal.
Enfin, il me semble - je n'ai pas trop approfondie cette question - que si Wittgenstein, dans son
Tractatus, est assez représentatif d'une façon de concevoir la philosophie analytique un peu trop aride et "logiciste" qui était peut-être assez caractéristique de ses débuts (au sein du Cercle de Vienne par exemple), la philosophie analytique actuelle est plus proche du tournant linguistique inauguré dans les
Investigations Philosophiques. La logique est au service de l'analyse du langage ordinaire mais ne cherche pas à s'y substituer.
Jocho a écrit :Ce qui est intéressant, c'est de replacer ce courant de pensée dans l'histoire. C'est la philosophie du XXe siècle. Siécle de la démocratie, du populaire, de la vulgarisation, de la «fin de la tradition»... Je crois qu'en y regardant de plus près, c'est de la «philosophie du peuple».
Compréhensible par le peuple, sans doute (du moins le peuple cultivé) mais n'est-ce pas rabaisser le peuple que d'y voir un défaut ? Il faut y voir surtout l'effet de l'effort de clarté et d'objectivité de la philosophie analytique. Cela ne doit pas être confondu avec de la vulgarisation, ou pire du populisme et de la démagogie. La philosophie analytique demande un certain effort intellectuel, mais elle n'est pas par principe cachée ou reservée au seul initié, elle ne demande pas non plus de faire preuve d'empathie envers l'auteur ou de le resituer dans sa culture, son histoire et son époque pour être correctement interprêtée. Or il me semble que la partie exégétique est souvent importante dans la compréhension de la philosophie non-analytique : mais qu'a-t-il bien voulu dire ? quel est le sens caché de son oeuvre ? etc. En philosophie analytique, même si je n'ai pas la prétention d'affirmer que l'aspect interprétatif n'existe pas et jamais, il me semble qu'il est généralement plus réduit, et facilité (entre autres parce que les philosophes analytiques font généralement l'effort de présenter leurs présupposés, au lieu d'attendre de leurs lecteurs qu'ils les devinent).
Quant au XXème siècle c'est aussi celui de la science, de la technologie, des progrès sociaux (même si beaucoup reste à faire !).
Jocho a écrit :Alors, après tout, moi je t'ai démontré ce qu'elle était ; mais je ne te condamne pas, et que faire à part te laisser y croire.
Idem pour toi
Miky