unptitgab a écrit :Je serai curieux de connaitre l'avis de Beetlejuice, afin de savoir si historiquement ça tien la route. Les petites notes qu'ils mettent sur leur site semblent le valider. Pouvoir mêler humour et histoire, un chouette moyen d'apprendre, si cela peut donner le goût de l'histoire aux gamins c'est à diffuser dans les écoles.
Vous savez qu'il y a sans doute d'autres passionné d'histoire que moi sur ce forum, hein...
Bon, disons que dans les grandes lignes, ça respecte ce qu'on apprend de l'histoire à un niveau basique (donc pas universitaire), mais ça n'échappe pas à certains poncifs et simplifications sans doute dû à un format trop court pour rentrer dans les détails.
Cela dit, pour la vidéo sur la première croisade, la vision que les personnages avaient des un et des autres est assez bien rendue, sauf peut-être pour le Calife Abbasside et l'assimilation des nizarites aux assassins du jeu Assassin's Creed. Même si cette secte Chiite est effectivement une origine possible du mot assassin et sert d'inspiration aux assassins du jeu vidéo, c'est pas forcément malin de reprendre ce code, parce que ça donne une fausse image de cette secte qui n'a finalement assassiné que très peu de gens.
La réaction de Kilij Arslan ou Alexis Comnène face au latins est assez correcte, les musulmans comme les byzantins ont effectivement perçu les croisés comme grossiers, mal élevés et barbares. La vidéo rend assez bien le choc culturel entre l'orient et l'occident à l'arrivée des barons croisés, car les empereurs byzantins et les divers souverains musulmans se reconnaissant les un les autres comme civilisés et partageaient de longue date des relations diplomatiques. Bien qu'en guerre perpétuellement, l'empire et le califat, puis les sultanats du Machrek avaient codifié leur relation, même guerrières et s'envoyaient régulièrement des ambassades en tentant d'impressionner l'autre par le luxe que chaque souverain pouvait déployer face aux ambassadeurs et les deux civilisations partageait une même continuité de la civilisation urbaine. A l'inverse, les latins étaient vu par les deux partis comme barbares et les diverses croisades, dont la quatrième prend Constantinople ne vont qu'accentuer cette reconnaissance mutuelle de civilisation entre orthodoxes grecs et musulmans tandis que le fossé entre chrétienté orientale et occidentale va s’agrandir. Ce qui crée un paradoxe irréconciliable dans l'empire byzantin après la quatrième croisade, car l'empereur, qui est à la tête d'un Etat faible et largement ruiné, reconstitué sur les ruines de l'éphémère Empire Latin de Constantinople, voit son mode de gouvernement se rapprocher de plus en plus du monde féodal latin et cherche de plus en plus l'appuie des latins contre ses ennemis qui sont soit musulmans, soit orthodoxes comme lui, alors que la population s'éloigne de plus en plus de la chrétienté occidentale et finit par préférer, pour une partie du clergé, être sous la tutelle des turcs Ottomans plutôt que d'unir les Eglises et de se soumettre au Pape. Mais je digresse.
Les costumes ne sont pas mauvais non plus, même s'il y a sans doute pleins d'imperfections et quelques anachronismes.
Par contre, ils se trompent en disant que le Sultan Seljoukide a été assassiné par les Nizarites, c'est son vizir qui l'a été. Malik Shah, lui, est mort de maladie. De la même manière, c'est pas exactement correct de parler de cité-Etat pour les villes syriennes après la mort de Malik Shah.
Théoriquement, toute ces cités sont sous l'autorité du Sultan et par lui du Calife de Bagdad, mais c'est juste que le pouvoir musulman étant un pouvoir essentiellement urbain, lorsque l'empire des seldjoukides s'enfonce dans la guerre civile, chaque émir des grandes cités de Syrie et de Palestine a fait un peu comme il voulait, ce qui est une longue tradition des empires musulmans, qui voit les gouverneurs des villes importantes échapper fréquemment au pouvoir central dès lors qu'il n'est pas capable de les contrôler.
Parler de cité-Etat sous-entendrait que chaque cité avait des institutions politiques propres, alors qu'on est plus en face d'un émiettement du sultanat à cause d'émir/Qadi/Bey, qui se taille des principautés dans les décombres d'une région en proie au chaos. Ca serait plus correct de faire un parallèle avec les Taïfas espagnols, mais je comprends la démarche, car le terme cité-Etat est plus évocateurs pour ceux qui n'y connaissent pas grand chose.
La vidéo sur la guerre des Gaules est du même genre. Assez bien faites, suivant à peu près l'histoire telle qu'on peut l'apprendre au collège, mais avec pas mal de simplifications et quelques erreurs, notamment la reprise du nombre d'un millions d'esclaves et de mort après la guerre des Gaules, qui est sans doute exagérée ou le fait que les gaulois n'écrivait pas du tout et que c'était interdit par les druides. L'existence même d'une religion druidique telle que la décrit César est pas mal discutée parmi les spécialistes des celtes, certains pensant que la religion druidique plus ou moins unifiées des celtes des Gaules était déjà un temps révolu depuis longtemps quand César en fait le récit et que les druides avaient sans doute été absorbé dans l'aristocratie des peuples celtes au moment de la conquête et ne correspondaient plus exactement à l'image qui s'est développé par la suite. Quand à l'écriture, le commerce qui était fait entre les peuples celtes de la moitié sud des Gaules et les cités grecques de Provence avait déjà développée l'usage du grec au moins comme langue commerciale et notariale, même si la civilisation très rurale des gaulois n'en usait que rarement (car l'écriture est surtout, dans l'antiquité, un élément urbain). Cela dit, c'est vrai que l'écriture était vraiment rare et il faudra attendre la fin du Ier siècle après JC pour que la romanisation de la Gaule en introduise l'usage courant parmi les notables des municipes gaulois.
Au final, la présentation est sommaire et pas très différente de ce qu'on trouve dans les manuels scolaires.
This is our faith and this is what distinguishes us from those who do not share our faith.
(John Flemming, Évêque irlandais, 3ème dan de tautologie, ceinture noire de truisme, champion des lapalissades anti-avortement.)