Quand je lis: "[..,] ce manque d'oxygène au cerveau et de mesurer avec toutes les petites électrodes comment se comportent les neurones en situation de perte de conscience transitoire."Emanuelle a écrit :Cela me permet d'apporter un début de réponse à ceci:Jean-Francois a écrit : Vous noterez en passant que si les conditions permettant les NDE étaient aussi variées que vous le dites, il y aurait certainement moyen de les observer (particulièrement auprès d'adeptes de la méditation).
Je traduis: le manque d'oxygène induit des perturbations dans le fonctionnement du cerveau, ces perturbations entrainent des modifications de la perception subjective du sujet. En d'autres termes, cela s'accorde pas mal avec l'explication la plus parcimonieuse qu'est "une forme complexe d'hallucination". Surtout, cette explication permet des études qui permettront des conclusions véritables. Alors que l'adhésion a priori à de l'inconnu ("on va dire que l'esprit quitte vraiment le corps ou que le cerveau possède un organe sensoriel inconnu qui permet de recevoir des informations venant d'ailleurs") ne le permet pas.
Sinon, concernant les témoignages, le problème de base est qu'ils sont faillibles (parce que la mémoire est un phénomène dynamique et non une source fixe comme un ROM) et que la complexité des choses fait en sorte que nous n'en retenons qu'une partie de la réalité. Ainsi, dans le récit de l'infirmière que vous considérez comme un témoignage justifiant les "vraies NDE", rien n'assure que l'infirmière rapporte textuellement les propos tenu. Elle résume la situation telle qu'elle s'en souvient. Mais rien ne semble avoir réellement été fait pour vérifier les faits, par exemple pour vérifier que personne n'a pu donner la moindre information au patient qui aurait pu faciliter sa reconnaissance de l'infirmière ou lui permettre de "décrire la salle dans laquelle il a été ressuscité". En fait, on ne sait même pas s'il n'a pas "reconnu" une autre infirmière auparavant* (s'il s'est trompé, ça n'a rien d'extraordinaire donc ne sera pas retenu) mais, même si ce n'est pas le cas, il peut effectivement l'avoir reconnu au timbre de sa voix entendu alors qu'il était dans le coma. Surtout que la profondeur du coma et les capacités cérébrales résiduelles n'a pas été évaluée de manière constante: il y avait plus urgent que de faire des tests de potentiels évoqués.
Tel que dit, c'est l'infirmière qui rapporte les faits (sa version des) et non le patient:
"'Oh, that nurse knows where my dentures are'. I am very surprised. Then he elucidates: 'Yes, you were there when I was brought into hospital and you took my dentures out of my mouth and put them onto that car, it had all these bottles on it and there was this sliding drawer underneath and there you put my teeth.' I was especially amazed because I remembered this happening while the man was in deep coma and in the process of CPR. When I asked further, it appeared the man had seen himself lying in bed, that he had perceived from above how nurses and doctors had been busy with CPR. He was also able to describe correctly and in detail the small room in which he had been resuscitated as well as the appearance of those present like myself."
Le premier problème est qu'on n'a aucune idée du temps écoulé ente l'événement et le récit de l'infirmière. Plus ce temps sera long, moins le récit correspondra à la réalité que l'infirmière a vécu (la mémoire n'est pas fiable et elle s'érode avec le temps). De plus, comme elle résume une situation, les propos qu'elle rapporte ne sont peut être pas exacts ce qui fait que nous n'avons qu'un souvenir peu fiable lorsqu'elle affirme "correctly and in detail". En plus, qu'est-ce qui permet d'affirmer qu'elle n'a pu diriger l'échange de manière à aider le patient à se "souvenir"? Rien. Elle a très bien pu compléter elle-même le récit du patient en donnant, involontairement, des informations pour l'aider à "se souvenir". (La création de faux souvenirs est un sujet d'étude sérieux en psychologie.) Notez que je ne dis pas que l'infirmière ment, loin de là. Je dis juste qu'il faut faire attention lorsqu'on se base sur des témoignages parce que la bonne volonté des témoins n'est pas un gage de véracité des observations.
Et présenter le cas comme "a veridical out-of-body experience" comme le font van Lommel et al. est, à mon avis, purement et simplement manquer de rigueur car c'est maintenir une ambiguïté (le cas est sans doute véridique, mais la décorporation ne l'est pas forcément). C'est présenter une anecdote pour ce qu'elle n'est pas: un fait bien vérifié.
La littérature sur les EMI/NDE est effectivement remplie de tels récits qui, si on les prend au premier degré, donnent une impression de réalité au décorporation. Sauf que ces récits restent anecdotiques et que l'accumulation d'anecdotes ne fera jamais une preuve scientifique décisive. Cela parce que la latitude d'interprétation est tellement grande qu'on ne sait même pas vraiment si les anecdotes se supportent réellement les unes les autres, si elles forment une catégorie homogène. D'ailleurs, à mon avis, vous le montrez indirectement an ayant votre interprétation personnelle des décorporations: vous ne croyez pas qu'un "esprit" (quoi que ce soit) quitte le corps pour observer (on ne sait comment) la situation d'un point de vue "3e personne", votre interprétation est plutôt que des informations arrivent (on ne sait d'où ni comment) au cerveau. Sauf que votre interprétation n'est pas soutenue directement par le récit de l'infirmière qui présente plutôt les choses comme une "véritable" décorporation, i.e., avec esprit-quittant-le-corps-pour-observer ("the man had seen himself lying in bed, that he had perceived from above how nurses and doctors").
Jean-François
* En "plus d'une semaine" ("[o]nly after more than a week do I meet again with the patient"), il a eu le temps de voir d'autres personnes.