LoutredeMer a écrit : 29 avr. 2025, 00:18
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Dom18 a écrit :D'extrême-droite Éric Delbeque? Je ne le pense pas.
1 - Je n'en sais rien. Mais ses arguments de l'article dans Paris-Match regroupent pas mal d'éléments de la pensée réac. Relisez-le.
Ce qu'il entend par ensauvagement et décivilisatilon peut correspondre au dernier fait d'importance, tragique, ce lycéen de 15 ans qui a agressé 4 autres jeunes et qui a tué une jeune fille.
2 - Ce sont de bien grands mots pour un fait divers. Une de mes élèves s'est fait tuer au fusil par son ex à la sortie du lycée, c'était il y a 20 ans et on ne parlais pas d'ensauvagement de la société.
3 - S'il veut parler des dégâts des réseaux sociaux sur les comportements, d'accord.
4 - S'il veut parler de prévention, de nouvelles prisons, de nouveaux établissements scolaires, logements et programmes pédagogiques, d'accord. Reste à voir ce qu'il dit au sujet de l'état.
5 - J'ai posté des études ici sur l'évolution de la violence en France et ce n'est pas le cas non plus. Les cambriolages, vols augmentent plus que de 5% oui mais sans agression. Ce qui signifie appauvrissement mais pas ensauvagement. Les droits humains ont aussi progressé donc pas de décivilisation.
6 - Dans l'article il parle par contre des zones de non-droit et je pense que c'est cela son sujet. Mais elles concernent quelques villes en France. Sur les cartes, beaucoup d'autres restent stables.
Quant à la jeunesse qui a perdu et pris de nouveaux repères plus violents soi-disant, à quel taux se monte-t-elle par rapport à tous les jeunes qui mènent une scolarité et une vie normales? Et vise-t-il une certaine jeunesse de cités ou pas?
La société, notre société, est-elle si en faillite ?
Ce qui fait consensus, c'est que la société va mal, que le malaise est généralisé, 20 % des jeunes sont en détresse (de memoire) et ça c'est très inquiétant et pas du tout porteur pour l'avenir.
7 - Ben c'est l'appauvrissement, le manque d'emploi (12,8% d'augmentation de chômeurs en un an entendu ce matin) et donc l'impossibilité pour beaucoup de se nourrir correctement et de se loger correctement. Toujours pas d'ensauvagement et de décivilisation à ce stade.
8 - J'ai commencé la lecture de son dernier livre (Les irresponsables) pour y voir plus clair et mieux appréhender l'auteur en ayant bien conscience qu'Eux Delbecque a une grille de lecture personnelle du monde, ce qui sous-entend potentiellement des faiblesses humaines avec des biais possibles.
Alors tiens-nous au courant.
1 - Certains de ses propos peuvent s'en rapprocher, je l'ai noté, pris isolément du contexte général de son interview.
Delbecque me donne l'impression de chercher des éléments de réponse à des problématiques existantes, d'après des constats qu'il a établis, mais pas d'asséner des solutions (de type binaire) clés en main.
Je le rapproche d'Alain Bauer en ce sens.
Comme je l'ai rappelé, ce sont des humains avec leurs failles et leurs grilles de lecture et d'analyse propres.
Leur point commun est qu'ils ont tous deux un haut niveau de compétence reposant sur une somme d'expériences, ce dont je ne dispose pas.
J'essaie de "faire avec", sans pour autant adhérer sans esprit critique. Ce qui est plus aisé de dire que faire.
2 - Il s'est produit une perte de repères, un abandon, une négation de liens sociaux (constatés dans plusieurs autres cas, où l'intention de tuer, du moins de blesser gravement physiquement est prépondérante. Le coup de poing est remplacé par une arme).
L'agresseur souffre d'un état dépressif profond, d'après les constats.
Il éprouve également une fascination pour ce qui a trait au nazisme avec la fréquentation assidue de sites d'extrême-droite, ce qui n'aide pas.
Eric Delbecque (extrait de son interview dans Paris-Match):
La « dé-civilisation », on en parle moins car les extrêmes peinent à l’instrumentaliser. C’est une analyse de fond qui se prête mal à la caricature d’extrême ou d’ultradroite. On peut définir la dé-civilisation comme la régression progressive de la civilité entre les citoyens. Un exemple : aujourd’hui, si on fait une remarque à un automobiliste imprudent ou à un piéton indélicat, la situation peut vite dégénérer : les insultes fusent et la rixe menace... On le voit dans notre quotidien. Si l’on combine l’ensauvagement (dans les quartiers de reconquête républicaine) et la dé-civilisation (un peu partout dans nos villes), on comprend comment se fabrique l’insécurité permanente. Il faut comprendre que mon travail n’est pas politisé et «politisable» : il ne cautionne aucun mouvement ou discours partisan. J’analyse l’insécurité par le prisme sociétal et civilisationnel.
Or, cela fait des années que la situation s’envenime : il faut donc l’évoquer sans langue de bois et en prenant de la distance, qui permet seule de de proposer des perspectives et des mesures de long terme, donc en capacité d’améliorer décisivement le quotidien de nos concitoyens. Il faut aussi prendre en compte de façon plus décisive la violence des mineurs, en augmentation constante. L’explication de cette montée en puissance est multicausale : s’y mêlent les carences précoces de l’environnement familial (entre 0 et 3 ans), les violences intrafamiliales, l’affaiblissement progressif de l’autorité dans nos structures sociales, le manque d’efficacité de la chaîne pénale, les difficultés liées à l’intégration, la précarisation socio-économique, etc.
L'insécurité permanente, partout sur le territoire français: non, nous n'y sommes pas rendus.
Par contre, des petits indications, qui réunies finissent par constituer une masse qui incite à réfléchir sur l'état des liens sociaux, et ne rendent pas particulièrement serein.
Le nombre d'affichettes dans les commerces, y compris dans les villages reculés, affichaient qui "fleurissaient" plutôt dans les villes plus importantes, stipulant le rappel à des règles élémentaires de politesse et de courtoisie, quand il n'est pas précisé les articles de loi relatifs aux agressions verbales et/ou physiques des personnes tombant sous le coup de la loi.
Il m'est arrivé d'intervenir, comme d'autres personnes, quelquefois pour calmer le jeu entre des individus très remontés.
Je n'ai pas le souvenir de la fréquence de telles algarades, il y a quelques années, algarades qui finissent par devenir banales au quotidien, même si elles restent encore rares. Leur fréquence est plus élevée.
La violence des mineurs...
Pour disposer de données fiables, il faut s'armer de patience, sélectionner les source, démêler le vrai du faux, comprendre et contextualiser.
J'ai trouvé:
https://www.francetvinfo.fr/replay-radi ... 44056.html
...Mais les mineurs d'aujourd'hui sont-ils plus violents ? Pour répondre à cette question, il faut faire un bond de quelques années dans les archives. Le premier rapport(Nouvelle fenêtre) qui donne des statistiques détaillées sur les infractions commises par les mineurs a été publié en 1953 et porte sur l'année 1952. Cette année-là, 12% des infractions reprochées aux mineurs visaient des personnes, 67% étaient "contre des biens" et 8% "contre les mœurs".
En 2023, les choses ne sont plus présentées de la même manière mais, si l'on additionne les coups et violences aux viols et agressions sexuelles, il s'avère que 30% des infractions reprochées aux mineurs visaient des personnes. En somme : la violence physique constatée des mineurs a été multipliée par trois entre 1952 et 2023...
Ce n'est cependant pas aussi simple et il est facile d'en tire des conclusions erronées.
Une autre source, institutionnelle, très intéressante:
https://www.senat.fr/rap/r21-885/r21-8850.html
Le ton est précisé d'entrée: la délinquance des mineurs, une connaissance imparfaite d'un phénomène complexe.
...CE QUE NE DISENT PAS LES CHIFFRES DE LA DÉLINQUANCE DES MINEURS
• Une perte d'intérêt des pouvoirs publics à retracer l'évolution de la délinquance des mineurs : les rapporteurs ont pu constater que, faute de commande politique, aucune photographie complète et actuelle de ce phénomène n'est disponible . Il n'existe de statistiques fiabilisées des mineurs mis en cause par les forces de sécurité que depuis 2016 , et elles posent toujours plusieurs difficultés 2 ( * ) . Dès lors, il est difficile d'en tirer des conclusions réelles et définitives .
Comment construire une politique publique efficace
sans connaître précisément le phénomène auquel elle est censée apporter des solutions ?
• Des chiffres qui ne peuvent à eux seuls rendre compte de la réalité de la délinquance : à cet égard, « il est erroné de considérer que le nombre de mineurs pris en charge par la police puis la justice illustre la délinquance des mineurs » 3 ( * ) . L'évolution de la délinquance dépend également de l'activité des services de sécurité ou encore de la propension des victimes à porter plainte , ce qui peut expliquer un certain décalage avec la réalité et le ressenti de la population .
• Une absence de prise en compte du rôle des réseaux sociaux : or, l'ensemble des personnes entendues ont admis que ces nouveaux outils numériques pouvaient amplifier la violence, favoriser le passage à l'acte, voire conduire à l'augmentation de certains faits (violence scolaire, infractions à la législation sur les stupéfiants, ou extorsions par exemple)...
On relève des contradictions...
...Dès lors, si la proportion des mineurs impliqués dans l'ensemble de la délinquance n'est que de 20 % en moyenne aujourd'hui, ils sont surreprésentés dans la commission de certaines infractions . Ainsi, s'ils représentent jusqu'à 46 % des mis en cause pour violences sexuelles sur mineurs, 40 % des vols violents ou 30 % des coups et blessures volontaires sur moins de 15 ans, ils ne constituent qu'environ 21 % de la population.
De surcroît, une publication récente 4 ( * ) met en évidence une nette augmentation des mineurs mis en cause sur une longue période : ils étaient 98 864 en 1992, 180 129 en 2002 puis 216 221 en 2010 . Leur nombre a ensuite diminué, oscillant entre 190 000 et 200 000 selon les années, pour atteindre 190 127 en 2019. Malgré le caractère officiel de cette publication, le ministère de l'intérieur ne valide pas ces statistiques .
Selon le ministère de l'intérieur, il est impossible de connaître de manière fiable l'évolution globale des mineurs mis en cause sur les trente dernières années....
Dans le reste de ce rapport, l'accent est mis sur l'anticipation et la prévention, chez les jeunes, et là encore, on constate des dysfonctionnements entre les dispositifs institutionnels qui génèrent des contradictions, minorent les effets attendus, deviennent pour certains contreproductifs.
Passage dense difficile à résumer dont il ressort, la nécessité d'une politique globla pensée en termes de moyens et d'accompagnement humain, à tous les niveaux.
L'état de la santé scolaire est catastrophique (médecin scolaires, infirmières, psychologues, services d'orientation,...).
De l'humain, et encore de l'humain!
Ce qui peut répondre, partiellement aux points 3 à 8.
Reste à connaître le point de vue de Delbecque et ses propositions éventuelles. Je ne dispose que de quelques indications, en ce qui concerne un projet cohérent de société globale organisée tel qu'il l'entend.
Je n'ai pas de solution, j'essaie simplement de comprendre, à mon niveau, en réunissant des informations, en m'appuyant sue l'expertise de personnes spécialisées, en principe. La tâche est ingrate parce que je suis sûr de rien, il y a de quoi s'y perdre, ce qui n'aide pas, tant il peut apparaître des zones obscures et des contradictions.
Là où Delbecque et d'autres ont raison, c'est l'urgence de dépasser les manoeuvres (bassement) politiciennes et de déterminer des politiques fortes qui dépassent les intérêts personnels et ceux d'un clan d'appartenance. Nous en sommes loin. l'insécurité, la répression,... c'est un bon filon et c'est lamentable.
Ensauvagement, décivilisation... je suis dubitatif. D'où un intérêt de cette discussion.