>Mais voyons, faites marcher les méninges! Arrêtez de faire exprès pour ne pas comprendre! Si la matière émergeait de façon naturelle, on pourrait observer cette émergence, décrire le mécanisme *naturelle* qui en est la cause.
Et le fait qu'un mécanisme naturel soit en cause ne disqualifierait pas l'existence d'un mécanisme surnaturel... Admettons même que l'on voie de la matière émerger actuellement par causes naturelles et que l'on refuse toute intervention surnaturelle dans ce cas précis : cela n'empêcherait pas de penser qu'une intervention surnaturelle, réelle celle-là, aurait créé l'Univers 6000 ans plus tôt. Les deux sont parfaitement compatibles.
Bon, ensuite, vous m'accusez d'avoir mal lu votre message. Je l'ai lu très attentivement, mais vous avez visiblement parcouru ma réponse en diagonale (vous avez déjà souligné, d'ailleurs, que vous affectiez ce mode de lecture). Je vais donc vous la réexpliquer.
Vous écrivez (en italiques) :
J : « si on observerait dans la nature des membranes plasmiques, des molécules d’ADN (et les enzymes nécessaires à leur synthèse) se former spontanément »
P : « Pas plus. Dieu a pu tout créer tel quel, non ? »
J : J’ai dis : « se former spontanément », c’est pas assez clair ?.
Pff... Par "tout", j'entendais la vie telle que nous la connaissons - la biosphère qui recouvre la planète. L'émergence de membranes plasmiques et d'ARN ne l'empêcherait pas d'avoir été créée tel quelle par Dieu. C'est une telle évidence que je me demande comment vous avez pu passer à côté.
>OK, d’accord. On pourrait croire en Dieu quand même, mais on ne pourrait plus dire que c’est Dieu qui a créé la vie.
Mais bien sûr que si ! L'apparition de formes de vie ultra-primitives spontanément en laboratoire n'empêcherait pas que l'ensemble de la biosphère ait été créée telle quelle préalablement. Au contraire, j'entends déjà l'argumentation créationniste : "Si la vie peut émerger d'elle-même, c'est parce que les lois de la physique sont ajustées avec précision pour lui permettre de se maintenir et de se développer ! La survenue accidentelles de "proto-abiogenèses" n'est qu'une conséquence secondaire de ce beau réglage effectué lors de la Création simultanée*
de toutes les formes de vie sur Terre".
*Enfin, "simultanée"... en quelques jours, évidemment.
>Et cela est le centre de la théorie créationniste. Votre manœuvre a échoué.
Pfff... Vous êtes certainement capable de comprendre pourquoi l'idée d'une création surnaturelle de tout en une seule fois par Dieu il y a 6000 ans est fondamentalement irréfutable.
>Pour ce qui est de l’évolution, elle a prouvé son statut infalsifiable. La prédiction centrale de cette théorie (gradualisme niveau espèce)...
Ouarf !!! La prédiction centrale de la théorie est le ponctualisme niveau espèce (prédiction qui a été effectuée grâce à la biologie moderne (ou néontologie, par opposition à paléontologie) et vérifiée - pas élaborée, vérifiée - grâce aux fossiles ultérieurement) et la continuité (ce que vous appeleriez le "gradualisme") niveau groupes plus vastes. Faut vraiment ne rien connaître à la théorie de l'évolution pour affirmer qu'elle prédisait le gradualisme niveau espèce (pléonasme, d'ailleurs, mais laissons tomber).
>s’est avérée nulle au fil des découvertes en paléontologie.
Non, pas "nulle" ! Je vous ai donné deux exemples de gradualisme phylétique (donc "par définition" au niveau des espèces) clairs : les ammonites du Jurassique inférieur et les campagnols du Quaternaire. Vous n'avez rien su répondre - car ces deux exemples, qui sont des classiques en paléontologie, vous sont, laissez-moi deviner, complètement inconnus. Vous êtes d'une ignorance abyssale dans ces domaines, Julien, reconnaissez-le. Et admettez que votre prétention à nous donner des leçons du haut de votre titre d'étudiant inculte est... légèrement exagérée.
(les références sont : J. Chaline & B. Laurin, « Phyletic gradualism in an European Plio-Pleistocene Mimomys lineage (Arvicolidae, Rodentia) » in Paleobiology vol. 2, 12 : 203-216 (1986) et J.-L. Dommergues, L'évolution des Ammonitina au Lias moyen (Carixien, Domérien basal) en Europe occidentale, thèse de doctorat de l'Université Claude-Bernard de Lyon (1987) ).
Il y a des dizaines d'autres exemples bien documentés de gradualisme phylétique - la prétention de la théorie des équilibres ponctués n'était pas d'affirmer l'inexistence du gradualisme, comme nombre de créationnistes le croient bêtement, mais d'affirmer qu'une autre modalité évolutive (utilisant les mêmes mécanismes de base, mais lors de rares épisodes, et non en permanence) devait être à l'oeuvre. Gould et son collègue Eldredge prétendaient en fait que leur travail était tout simplement une vérification par l'observation (paléontologique) de modèles émis en biologie trente ans plus tôt (selon lesquels les formations d'espèces nouvelles étaient des événements rares et relativement courts, s'étendant sur quelques milliers d'années) dans le cadre du néodarwinisme.
>Gould a passé une partie de sa vie à essayer de faire admettre le constat à ses collègues néo-darwiniens
La quasi-totalité l'ont admis (contrairement à ce que j'ai récemment lu sous la plume d'un biologiste, d'ailleurs) - car ils savaient très bien que cette discontinuité reflétait une prédiction de la théorie et non son imperfection, pas plus que celle des archives fossiles (qui est réelle, mais pas permanente). Beaucoup ont critiqué l'importance "exagérée" que l'on avait donné au modèle de Gould, car ils affirmaient que le ponctualisme "n'avait fait qu'appliquer aux fossiles des idées développés par d'autres sur la base des organismes vivants" et n'était "qu'un point de détail légèrement retouché dans le paysage du néodarwinisme". Cette minimisation me semble excessive : le travail de Gould est réellement considérable, et a représenté un réel changement de la manière de voir les choses en paléontologie.
Les paléontologues ignoraient tout de la génétique des populations (ce dont on ne peut leur tenir rigueur), et s'accrochaient encore à l'idée invalidée (à leur insu) d'un gradualisme phylétique omniprésent, n'admettant aucune autre modalité évolutive, même légèrement différente. Gould les a forcés à ouvrir les yeux sur la découvertes de la biologie contemporaine - à admettre qu'avant d'être des fossiles, les organismes disparus avaient eu des gènes, des tissus, une ontogenèse - en un mot qu'ils avaient été vivants, et que les données établies sur la base de l'observation des organismes actuels devaient très certainement les concerner aussi. Puisque Mayr avait montré que la spéciation (formation d'une espèce totalement nouvelle) se produisait rarement, en un temps généralement court (5000 ans environ) et en marge des grandes populations, puisque la génétique des populations avait montré que les mutations génétiques pouvaient difficilement se répandre dans de vastes espèces bien installées mais se fixaient rapidement dans les petits isolats marginaux que Mayr voyait à l'origine de nouvelles espèces, ç'avait bien dû être vrai pour les fossiles quand ils étaient encore vivants. Autrement dit, l'espèce devait rester stable la plupart du temps, sauf lorsque la formation d'un isolat provoquait une spéciation rapide. Le passage d'une espèce à une autre ne pouvait, dans ce cas, être appelé autrement qu'une ponctuation.
>(ayant lui-même redonner l’espoir à la théorie...
Ouarf !!!!!! Mais vous le faites exprès ? Comme si "la théorie" [qui est en réalité un fait] avait "perdu espoir" [alors qu'il n'y avait que quelques trublions intégristes plus rigolos qu'autre chose pour s'y opposer] !
Bon, je vous rappelerais également que dans "avoir redonné l'espoir", redonné est un participe passé et ne s'écrit donc pas redonner. Mais ce n'est pas le sujet.
>Pendant ce temps, les créationnistes savourent l’avancement scientifique qui confirme la prédiction centrale de leur théorie ; origine distincte/discontinuité.
Mais pas du tout ! La discontinuité n'est pas une prédiction du créationnisme, premièrement ; et deuxièmement, quand vous assimilez la théorie des équilibres ponctués à une confirmation du créationnisme, vous ne faites que répéter bêtement de vieilles bêtises introduites par votre collègue Duan Gish. Ce n'est donc pas à vous que je reprocherai cet amalgame : vous êtes suffisamment ignorant en paléontologie pour que votre bonne foi ne puisse pas être mise en doute, et n'avez sans doute fait que resortir bêtement ce qu'on vous avait appris.
La théorie des équilibres ponctués ne fait que vérifier chez les fossiles des prédictions introduites par la biologie contemporaine. Lorsque l'enregistrement sédimentaire est mauvais, cela se traduit de la manière suivante : l'espèce reste stable, puis une nouvelle espèce apparaît subitement. Il y a donc discontinuité au niveau des espèces, mais toujours continuité à tous les autres niveaux, ce que vous ignorez superbement bien que ç'ait été prédit par l'évolutionnisme et vérifié dans tous les cas.
Lorsque l'enregistrement sédimentaire est bon, c'est encore plus fascinant : on se rend compte que toutes les formes intermédiaires entre l'espèce "ancêtre" et l'espèce "fille" se succèdent bel et bien... mais dans un temps extrêmement court (quelques milliers d'années) et, géographiquement, dans un lieu éloigné de celui où vivait l'espèce originelle. N'y allons pas par quatre chemins : c'est une spéciation fossilisée, tout simplement. De tels exemples sont réellement fascinants - on en connaît plusieurs, notamment chez certains trilobites (Phacops) retrouvés près de New York.
>Même si elle était franchissable, elle n’a pas été franchi.
Stop ! Absence d'argument ! Affirmation gratuite ! [et faute de syntaxe, mais passons : nous n'allons pas vous apprendre en une seule fois le français et la biologie]
>Le conte du passage P/E couvre 1/3 de l’histoire de la vie (selon une échelle de temps imaginaire évolutionniste)...
Stop ! Le mot "imaginaire" est injustifié ! (ne répondez pas avec votre article "deux arguments-clés en faveur d'une Terre jeune", merci).
Bon, ensuite, je vous ai déjà expliqué qu'il ne couvrait pas 1/3 mais sans doute beaucoup moins. Lynn Margulis, qui est la spécialiste de la question, affirme que le délai avancé par certain d'un milliard d'années est dix bons millions de fois trop long, et que quelques dizaines de millions d'années ont largement pu suffire.
>Disons que je vous dis de créer 5 voitures. D’un modèle à l’autre on y verra des différences incontestables, une discontinuité claire puisque vous ne pouvez pas répéter 5 fois /5 les mêmes idées (sinon, vous devriez vous limiter à créer une seule voiture). Vous allez peut-être avoir fait une moto, une auto, un camion, … Il est évident que des ressemblances vont en ressortir puisque les 5 accomplissent des fonctions similaires. Même chose pour les matériaux ; vous n’allez sûrement pas faire une moto en plastique, une auto en papier et un camion en carton ! Il y a certains matériaux appropriés pour ce genre de « création » et vous n’avez pas 2 000 choix. Pour les êtres vivants c’est exactement la même chose.
Arrête ton char, Ben Hur : qui êtes-vous pour vous exprimer sur les motivations du Créateur ? Qui êtes-vous pour penser qu'il s'y prendrait ainsi pour fabriquer des modèle de voiture ? Et qui vous dit que je ne préférerais pas fabriquer une série de modèles semblant montrer une continuité ? C'était votre ami ScienceCréation qui disait, quand on lui parlait du Déluge, que "les motivations de Dieu sont inacessibles à nos pauvres esprits" ? Dieu aurait très bien pu avoir créé des êtres vivants semblant varier de manière continue - d'un point de vue théorique, dans le cadre de votre système de pensée (que je n'ose appeler un "modèle"), c'est tout à fait plausible.
>La discontinuité est prédite puisque chaque type est créé séparément.
Mais non ! On peut créer séparément des types semblant varier de manière continue ! Réfléchissez.
Il y a une continuité claire entre le dinosaure et l'oiseau, entre le "singe" et l'homme, et vous soutenez pourtant que chaque maillon de la "chaîne" a, dans les deux cas, été créé indépendamment des autres. Le Créateur a très bien pu avoir créé séparément des types paraissant, une fois placés ensemble et dans un ordre précis, montrer une continuité. Aucun argument sérieux ne s'y oppose. Mieux, pour expliquer les innombrables transitions évolutives constatées dans les fossiles, vous êtes obligé de l'admettre - création séparée n'est pas incompatible avec continuité apparente, ni avec quoi que ce soit, d'ailleurs.
>De plus, on ne change pas de matériaux à chaque être vivant.
Et pourquoi pas ? Pourquoi votre créateur s'ennuie-t-il a créer une dizaine de types de nageoires différentes (pour les poissons, les cétacés et les différents reptiles marins) et quatre types d'ailes (reptiles volants, oiseaux, chauves-souris et insectes) là où un suffirait ? Pourquoi, au contraire, ne prend-il même pas la peine de doter un marsouin, une pipistrelle, un lion, la chatte de Denis et le monument de perfection que vous êtes de structures osseuses différentes ? A cela, vous ne pouvez que répondre "le Seigneur l'a fait, il doit bien avoir une raison qui nous est inaccessible". Mais puisque ses motivations nous sont inaccessibles, alors nous ne pouvons nous permettre de spéculer sur ses procédés favoris.
>Vous n’avez pas pensé que ce pouvait être les évolutionnistes (notamment les fanatiques de ce forum et une poignée d’autres évolutionniste) qui transforment tout argument créationniste en une attaque (ou une haine) de l’évolution ?
Prff... comme si les créationnistes avaient besoin des évolutionnistes pour se discréditer, alors qu'ils le font si bien eux-mêmes ! Suffit de les lire, comme je le fais de temps en temps depuis plusieurs années - et, toujours, avec le même mélange d'amusement et de consternation. Je connaissais déjà bien la théorie de l'évolution quand je me suis intéressé au créationnisme. Pas une seule fois, je ne me suis senti perturbé dans mes convictions - car je connaissais déjà les "faits" cités en guise d'argument, et je pouvais voir à quel point ils étaient mal interprétés ou malhonnêtement déformés. Pas une seule fois même je n'ai ressenti d'intérêt ou d'admiration envers un raisonnement intelligent, une idée astucieuse, une manière nouvelle de voir les choses - ce qui m'arrive pourtant parfois même quand je lis les argumentaires en faveur des théories scientifiques que j'aime le moins. Le "créationnisme scientifique" ne valait rien pour l'évolutionniste que j'étais - et il ne vaut toujours rien pour celui que je suis encore à l'heure actuelle. Après la lecture de centaines et de centaines de pages pro-créationnistes, je peux l'affirmer : je n'y ai rien trouvé d'intéressant, d'intelligent, ou même de brillant, d'astucieux. Juste des incompréhensions, des mauvaises citations et des mensonges délibérés.
>En finissant, je redemande les références promises.
Sur l'apparition spontanée de symbiose chez les micro-organismes :
K. W. Jeon, « Development of cellular dependence on infective organisms : micrurgical studies in amoebas » in Science vol. 39, 176 : 1122-1123 (1972)
Id., « Endosymbiosis in amoebae : recently established endosymbionts have become required cytoplasmic components » in Journal of Cellular Biology vol. 2, 89 : 337-344 (1976)
Id., « Change of cellular "pathogens" into required cell components » in Annals of New York Academy of Science 503 : 359-371 (1987)
Ces références concernent l'apparition d'une symbiose profonde entre une amibe et une ancienne bactérie pathogène qui avaient coévolué jusqu'à ne plus pouvoir se passer l'une de l'autre. La bactérie s'était incluse dans le cytoplasme de l'amibe. Au final, on se retrouvait avec un seul organisme - là où il y en avait autrefois deux - tellement la symbiose était devenue profonde. Exactement ce qui se serait passé lors de la fusion de plusieurs micro-organismes qui aurait donné naissance aux mitochondries et chloroplastes des eucaryotes.
Il a été également montré par le même auteur que les symbiontes avaient perdu de nombreux gènes auparavant nécessaires à la survie, car ils les trouvaient "tous prêts" chez l'autre.
Des séquençages de plusieurs gènes et des expériences de transfert de noyaux ont montré que le code génétique des symbiontes avait profondément coévolué par accumulation de mutations. Les amibes symbiontes ont en particulier une activité enzymatique très différente de celle de leurs équivalents non-symbiontes, du fait de la présence de la bactérie symbiotique.
Plus étonnant encore : on a montré que des réseaux d'interactions moléculaires d'une extrême complexité avaient fini par unir ces deux organismes qui ont fini par n'en devenir plus qu'un. Il a été en particulier montré que la bactérie avait acquis la possibilité de réguler directement l'expression des gènes de l'amibe hôte. Le scénario se présente comme suit : la bactérie produit une protéine particulière, s29x, qui se répand dans le cytoplasme de l'hôte. Cette protéine finit par rencontrer le noyau. Il a été montré que l'amibe avait acquis la capacité de "stocker" s29x au sein de celui-ci : une fois la protéine entrée dans le noyau, elle ne resort plus. Une telle aptitude nécessite probablement la mise en oeuvre de gènes profondément et habilement modifiés à partir de la souche originelle. Une fois la protéine en question présente en concentration suffisante dans le noyau, il semble qu'elle interagisse avec le génome de l'hôte, activant ou réprimant spécifiquement la transcription de tels ou tels gènes.
Si j'ai détaillé ce mécanisme moléculaire, ce n'est que pour souligner un fait étonnant : il est apparu graduellement par coévolution de deux organismes qui, au départ, s'ignoraient, puis dont l'un a fini par acquérir la possibilité de contrôler le génome de l'autre. Comment peut-on expliquer l'émergence progressive de ce mécanisme symbiotique si complexe par des mutations génétiques et par la sélection naturelle ? Comment établir un scénario évolutif plausible ? Pas facile, hein ? (du moins à première vue) Supprimez un seul élément, et tout le système s'effondre. On dirait un cas de complexité irréductible. Le créationniste moyen dirait qu'il n'a pas pu apparaître par évolution graduelle... sauf que c'est précisément ce qui s'est produit sous les yeux de l'expérimentateur. Face à des réseaux d'une telle complexité, quand on considère les interactions mitochondries-reste de la cellule, qui ne sont certainement pas moins simples, on se dit que oui, l'origine endosymbiotique des mitochondries est plus qu'envisageable.
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