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Re:sortie du corps épisode 2 suite et fin


Re: sortie du corps épisode 2 -- Sphinx
Posté par Sphinx , Dec 11,2002,13:12 Index  Forum

J’ai aussi pu voir une salle commune avec des gens qui dormaient, et surtout un couloir où se trouvait un robinet, un point d’eau. Après l’opération, lorsque j’ai été réveillé, j’avais une soif terrible, mais on m’avait interdit de boire. Je me suis levé, je savais que ce point d’eau se trouvait deux portes plus loin .. Je suis sorti de ma chambre, et je m’y suis rendu directement, je suis allé boire à cet endroit que je savais être là !» ( J.M.)

Dans cet autre cas, le patient était entré inconscient à l'hôpital. Il y mettait les pieds pour la première fois (si l'on peut dire, puisqu'il est arrivé sur un brancard...), ce qui élimine l'hypothèse d'une visite antérieure qui lui aurait permis de mémoriser inconsciemment ce qu'il rapporte avoir vu. Quand aux "objets" de cette perception, ils sont on ne peut plus réels, puisque pour la plupart vérifiés en compagnie du chirurgien. Quand au point d'eau
dans le couloir, ça ne s'invente pas !
Là non plus nous ne pouvons parler d'hallucination, malgré l'impossibilité d'expliquer les perceptions décrites par le patient, qui était inconscient sur la table d'opération lors de son expérience.

Dans un couloir de l’hôpital, un élève infirmier voit un jour un vieux monsieur se diriger vers lui, et lui dire, hilare : « alors, tu as fini par la trouver, la planche ?… ». Le grand-père, devant son air passablement ahuri, commence alors à lui expliquer : « Tu ne te souviens pas de moi, mais moi je me souviens de toi ! ».. Il reconnaît alors ce monsieur, qui était arrivé aux urgences en arrêt cardiaque quelque temps auparavant. Et l’ancêtre continue son explication : « j’ai tout vu d’en haut, quand vous essayiez de faire repartir mon cœur… On t’a demandé d’aller chercher une planche, et tu étais affolé, tu la cherchais partout et elle n’était pas là où elle aurait dû être.. Je t’ai suivi tout le long, et tu as fini par la trouver dans la cuisine ».

Cette planche que l’on glissait sous le dos du patient était utilisée pour les massages cardiaques, qu’il vaut mieux effectuer sur un plan dur. Les choses s’étaient bien passées comme le patient, qui était en arrêt cardiaque à ce moment là, les avait « vues ». C’est bien une aide-soignante qui, après avoir lavé la planche, l’avait laissée à sécher à l’office au lieu de la remettre à sa place. Etant en arrêt cardiaque et dans le coma, à aucun moment il n’avait pu voir l’infirmier -dont le rôle s’était borné à chercher la planche- qui m’a rapporté cette histoire, ce qui ne l’a pas empêché de le reconnaître.

Le cas suivant a été rapporté aux auteurs d’une récente étude hollandaise (8) par une infirmière de l’unité de soins intensifs, et est remarquablement similaire au précédent, à ceci près qu’il s’agit d’une histoire de dentier et non de planche :
Une ambulance amène aux urgences cardiologiques un homme de 44 ans, cyanosé et comateux. Il avait été trouvé une heure auparavant dans un pré par des passants. A son admission, il est mis sous respiration artificielle sans intubation, pendant qu’on pratique massage cardiaque et défibrillation. Quand nous avons décidé de l’intuber, nous nous sommes aperçus qu’il portait un dentier. Je lui ai enlevé son appareil et l’ai rangé sur le chariot à pansements. Pendant ce temps, la réanimation intensive était poursuivie. Après une heure et demie, le rythme cardiaque et la tension étaient remontés à des valeurs suffisantes, mais il était toujours ventilé et intubé, et encore dans le coma. On le transféra dans une unité de soins intensifs pour continuer la respiration artificielle et la surveillance que nécessitait son état. Ce n’est qu’une semaine plus tard que je le revois, quand il est de retour dans le service de cardiologie. Au moment où il m’aperçoit (je distribuais les médicaments), il dit : « oh, cette infirmière sait où se trouve mon appareil dentaire ! » Je suis surprise, et il m’explique : « Oui, vous étiez là quand on m’a emmené à l’hôpital, vous m’avez enlevé le dentier de la bouche et vous l’avez mis sur ce chariot avec tous ces flacons, il y avait un tiroir sous le plateau et c’est là que vous l’avez rangé ! »
J’étais totalement stupéfaite, car je me souvenais parfaitement que tout cela s’était passé pendant que ce patient était dans un coma profond, durant la réanimation cardio-respiratoire. Quand je lui demandai de m’en dire un peu plus, il me raconta s’être vu allongé sur le lit, voyant aussi de dessus les infirmières et les médecins occupés à le réanimer. Il a été capable de décrire avec précision et en détails la petite pièce dans laquelle il avait été ressuscité, aussi bien que l’apparence physique des personnes présentes, dont moi même. Au moment où il observait cette scène, il avait très peur de mourir si nous cessions nos efforts. Et effectivement, nous étions très pessimistes sur ses chances de survie, à cause de son état désastreux à l’arrivée. Le patient me raconta qu’il avait désespérément, mais sans succès, essayé de nous faire comprendre qu’il était toujours vivant et que nous devions continuer la réanimation. Cette expérience l’a profondément impressionné et il dit n’avoir plus peur de la mort. Il a quitté l’hôpital un mois plus tard, en bonne santé.

Tous ces cas (qui sont loin d'être des exceptions) sont caractérisés par la perception objective de scènes complètes, d'objets, d'un environnement, et de dialogues, le tout bien réel et ayant été vérifié dès que cela a été possible, ce qui différencie sans ambiguïté ces expériences de celles qui ont pu être induites par stimulation électrique de certaines zones cérébrales.
En résumé, nous pouvons classer les OBE ou EHC en trois catégories :

Type I - Perception du corps et de sa position dans l'espace depuis un point extérieur à celui-ci, impression de mouvements et/ou de légèreté, le tout sans perception de quoi que ce soit d'extérieur au corps : cette expérience est reproductible par stimulation électrique corticale, et peut être due à une activité spontanée de la zone impliquée, sans qu'il soit besoin de parler d'épilepsie. Lors de l'endormissement, dans certains états de conscience "intermédiaires" ainsi que lors de l'activité onirique, il peut persister ou survenir une activité autonome dans certaines zones cérébrales, en particulier quand ces dernières ne sont plus connectées à leur environnement habituel. Les images hypnagogiques, les bourdonnements ou bruits divers qui apparaissent lors de l'endormissement en sont un bon exemple. Toute expérience présentant ces caractéristiques peut donc, dans le doute, être classée dans la catégorie des illusions somatosensorielles, lesquelles ne sont pas obligatoirement pathologiques.
Type II - Il peut exister une expérience intermédiaire, avec perception du corps (toujours depuis un point extérieur) mais aussi de son environnement, le point fondamental résidant dans le fait que ce dernier est familier ou du moins connu du sujet. Dans ce cas un doute subsiste : en effet, certaines zones du cerveau sont spécialisées dans la mémorisation et la reconnaissance de l'environnement, et il est tout à fait possible qu'un fonctionnement atypique du cerveau soit à l'origine
d'une illusion perceptive, rajoutant à la perception du corps celle de son environnement immédiat. Dans le doute, et en l'absence d'éléments objectifs et vérifiables, cette catégorie est, comme la première, à classer comme possible illusion somatosensorielle et environnementale.

Type III - Perception de détails environnementaux, d'objets précis, inconnus du sujet au préalable et vérifiés ultérieurement, le tout depuis un point de vue extérieur au corps, le plus souvent avec un état fonctionnel cérébral incompatible avec une quelconque perception : ce type d'expérience est caractérisé par une perception objective, quoique inexplicable, et n'a jamais pu être reproduit expérimentalement par des moyens artificiels. C'est celle qui est la plus courante lors des premiers stades des EMI, et elle peut être considérée comme OBE ou EHC "authentique".


La validité des recherches sur les EMI est parfois mise en cause du fait de leur caractère apparemment subjectif. Ces expériences comportent en fait un certains nombre d'éléments objectifs, et j'ai essayé dans de précédents articles (5) de montrer comment leur étude approfondie pouvait nous permettre d'avancer dans nos recherches. Lorsque l'expérience débute par une OBE/EHC, certaines perceptions (environnement, personnes, dialogues, détails d'objets ou autres) ne peuvent être qualifiées de subjectives si elles ont pu être
vérifiées ultérieurement, et ce sont elles, entre autres, qui permettent de penser qu'il y a dans les EMI beaucoup plus que des hallucinations dues à une souffrance cérébrale ou à un mode de défense psychologique.
L'expérimentation que nous venons d'étudier nous permet de mieux cerner les limites entre subjectif et objectif, c'est à dire entre perception illusoire d'une réalité "intérieure" opposée à celle, objective, d'une réalité extérieure partagée par d'autres personnes présentes. Les réactions qu'elle a suscité montrent l'intérêt d'une approche scientifique de ces phénomènes qui sont encore mal connus et donc difficiles à cerner. Cette recherche nécessite rigueur et honnêteté, si l'on veut éviter de rester dans un flou artistique propice à tous les égarements.
Il conviendra donc dorénavant d'être prudent avant de qualifier une expérience d'authentique, puisqu'il est possible qu'un certain nombre de cas jusqu'à présent classées comme EHC ou OBE soient des illusions somatosensorielles d'origine cérébrale (Types I et II).
En revanche, les cas documentés où il y a eu perception objective, vérifiée, d'éléments extérieurs au corps et inconnus du sujet au préalable (Type III) n'ont toujours aucune explication. Ils restent à explorer et posent la question de la possibilité d'une perception sans intervention des organes sensoriels, et au bout du compte celle de la localité ou de la non-localité de la conscience (5) (6).


REFERENCES

1- Blanke Olaf, Ortigue Stephanie, Landis Teodor, Seeck Margitta. "Stimulating illusory
own-body perceptions", Nature 419, 269 - 270 (2002) olaf.blanke@hcuge.ch

Résumé de l'article
(disponible sur le site de la revue : http://www.nature.com/nature/ )
'Out-of-body' experiences (OBEs) are curious, usually brief sensations in which
a person's consciousness seems to become detached from the body and take up
a remote viewing position. Here we describe the repeated induction of this
experience by focal electrical stimulation of the brain's right angular gyrus in
a patient who was undergoing evaluation for epilepsy treatment. Stimulation
at this site also elicited illusory transformations of the patient's arm and legs
(complex somatosensory responses) and whole-body displacements (vestibular
responses), indicating that out-of-body experiences may reflect a failure by the
brain to integrate complex somatosensory and vestibular information.

2-Chez les droitiers, le gyrus angulaire droit intègre les informations sensorielles (visuelles et
somesthésiques, c'est à dire en provenance des membres) relatives à la perception du corps et à sa position dans l'espace, ce qui en permet la représentation mentale. La même zone à gauche est, elle, plutôt impliquée dans la compréhension du sens du langage, ainsi que dans l'intégration de ce dernier avec la vision et le repérage spatial.

3- c'est à dire en rapport avec l'organe et la zone corticale responsables de l'équilibre et de la
notion de position du corps dans l'espace.

4- Penfield W., "The Role of the Temporal Cortex in Certain Psychical Phenomena", Journal of Mental Science, 1955.

5- Jourdan Jean-Pierre." Les dimensions de la conscience", Cahiers de IANDS-France, N°7,
janvier 2001.

6- Ransford Emmanuel. "Conscience non-locale et NDE : une hypothèse", Cahiers de
IANDS-France, N°7, janvier 2001.

7- Sabom M.B., Light and Death : One doctor’s fascinating account of near-death experiences. Grand Rapids, MI ; Zondervan 1998.

8-Van Lommel Pim & al., « Near-Death Experience in survivors of cardiac arrest : a prospective study in the Netherlands », The Lancet, vol 358, Décembre. 2001


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