Euh, ton post-scriptum s'adressait-il à moi ou a Axle ? quand je demandais s'il avait lu des bouquins scientifiques ces 20 dernières années, je m'adressais évidemment à Axle, pas à toi qui a déjà l'air de t'y connaître un peu...
Et sur Darwin, que je ne le remet pas en cause. Je pensais juste aux périodes d'évolution rapide mises en évidence par Gould et qui n'avaient pas été imaginées par Darwin - mais je reste d'accord avec toi sur le fait que cela ne change en rien la validité du darwinisme, du moins du darwinisme actuel.
Bon, concernant le libre-arbitre... la question est déjà plus compliquée. Je ne considère pas que la définition du libre arbitre soit très évidente, et en fait mes orientations philosophiques (tendances très wittgensteiniennes) m'inciteraient plutôt à croire que c'est justement parce que le concept de libre-arbitre est ambigu qu'il y a des des controverses à ce sujet, qui consistent essentiellement en faux problèmes générés par l'usage d'un langage équivoque.
Je suis d'accord pour dire que Deep Blue n'a aucun libre arbitre, car il n'a pas de conscience de lui-même.
Je suis d'accord pour dire que tout dans la psychologie humaine est une affaire de processus electro-chimiques entièrement déterminés.
Mais, désolé, il risque malgré cela d'y avoir entre nous une querelle philosophique très technique, à propos du concept de libre arbitre. C'est que je ne suis pas d'accord pour le définir par opposition au déterminisme, comme c'est le cas chez la plupart des philosophes. Cette opposition est simplement dénuée de signification.
Comment dire exactement sans ecrire dix pages sur le sujet ? Je suis un peu limité par le temps et la place, comprends-moi...
Disons simplement que pour moi le libre arbitre est un corollaire immédiat de la conscience de soi, et que toute utilisation de ce terme hors de la référence directe à cette conscience n'est pas valable.
Je pense possible que le déterminisme au niveau neurologique n'ait aucune implication sur le libre arbitre ni sur la religion ou la spiritualité en général (et je ne dis pas ça pour défendre la foi, je suis totalement athée), car rien ne nous interdit de considérer la conscience comme la propriété émergente d'un certain niveau d'intégration fonctionnelle.
On sait que les propriétés émergentes des niveaux supérieurs peuvent avoir une influence rétroactive sur les processus des niveaux inférieurs : des processus chimiques dans notre cerveau provoquent ce qui se manifeste à nous comme des pensées ou des émotions, mais inversement des idées peuvent provoquer la mise en oeuvre de processus chimiques qui vont avoir une nouvelle influence sur le cerveau.
Nous pourrions considérer que la façon dont la conscience peut retro-agir sur ses niveaux inférieurs fait elle aussi partie d'un déterminisme global; mais la conscience est un phénomène unique, mal compris et mal défini. Ce n'est pas parce que tout dans la nature suit un déterminisme aveugle (déterminisme toutefois mis à mal par la théorie du chaos, et à tous les niveaux, remarque...) que nous aussi : rien dans la nature à part nous n'a conscience d'être. Pour moi la conscience n'est que la conscience de notre capacité à agir : notre libre-arbitre (en considérant que même un pensée est une action). Et peut-être que la spécificité de la conscience est finalement de pouvoir agir sur elle-même et contrôler en partie son propre fonctionnement. Et ceci sans aucun spiritualisme immatérialiste.
Il s'agit juste d'opérer un déplacement et de ne plus considérer la nature et ses lois comme une grande pyramide strictement hierarchisée dont chaque étage peut totalement expliquer le fonctionnement de l'étage suivant, mais comme quelque chose de bien plus complexe, où les interactions ont lieux entre tous les niveaux. Une conception holistique, mais sans mysticisme.
Je précise qu'il ne s'agit pas de ma part d'une croyance, mais d'une hypothèse.
Gaël.
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