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Pseudosciences : le phénomène de société.


Postée par Ch.Bertrand , Aug 10,2000,21:58 Index  Forum

On présentait, sur les ondes de la SRC, un reportage sur la popularité des milices en Ontario.

Ce phénomène est analogue à la montée des pseudosciences et de leurs déclamateurs.

Au début, on a un problème, ici la police « officielle » qui est dépassée par la demande, déjà qu'elle n'est pas nécessairement bien vue. Ensuite, la milice se créée, et se justifie par la demande. Enfin, la milice, se sentant mal perçue par le public à cause de quelques dérapages, demande les mêmes pouvoirs que ceux réservés à la police, sans pour autant avoir une formation équivalente à celle-ci. Et, épilogue, la police s'insurge contre cette possibilité, passant ainsi pour corporatiste ou dogmatique, et réapparaissant sous un mauvais jour.

J'ai toujours pensé que la montée en popularité du nouvel âge et des pseudosciences trahissait un phénomène de société beaucoup plus large que l'opposition scepticisme-pseudoscience. Et il me semble qu'on cherche trop peu à cerner ce phénomène ; je me souviens au mieux que Philippe Thiriart l'a abordé dans un article du Québec sceptique, article où il était notamment question de flagornerie.

J'avancerai donc les traits de société suivants - il y en a sûrement d'autres, ou ces traits se subdivisent peut-être, ou encore il y a sans doute des liens entre ces traits qu'il faudrait expliciter, je ne pose ici qu'une piste de réflexion.

1)Disparition des autorités uniformisant les modes de pensées - que ces autorités soient gouvernementales, scientifiques, religieuses, et autres.

2)Manque d'objets en lesquels croire, donc manque d'une explication non empirique du monde - Dieu, la patrie, la science telle que vue par les scientistes, et autres.


3)Par ordre de cause à effet : explosion des frontières, qu'elles soient géographiques, idéologiques, psychosociologiques (mon moi est aussi bon que le tien) ; égalitarisme naissant ; refus de la hiérarchisation sociétale - exemple le plus évident et le plus ancien, la (supposée) disparition des classes - ; et revendications en conséquence.


4)En réponse à ces nouvelles revendications, émergence de nouvelles autorités, aux fondements moins solides puisque ces nouvelles autorités sont neuves (c'est bien la seule excuse qu'on peut leur accorder), et plus superficiellement et complaisamment opportunistes et récupératrices étant donné qu'elles bénéficient d'une hyper-médiatisation et d'une hyper-commercialisation dont les autorités traditionnelles ne bénéficiaient pas à leur naissance, et qu'elles ont encore de nos jours de la difficulté à utiliser à fond.

4,1)Recul dans l'opinion publique (et serait sans qu'elle ne s'en rende compte) de l'empirisme comme mode de connaissance du monde.

5)Non-émergence d'une nouvelle autorité de type traditionnelle qui permettrait de faire un tri.

Voilà, très grosso modo, ce qu'il me semble y avoir sous la popularité du nouvel âge, des pseudosciences et de leurs gourous. À vous ciseaux maintenant, qu'on affine cette forme encore brouillonne...

Ch.Bertrand


N. B.

Éclaircir cette problématique me semble d'autant plus important que le scepticisme pourrait en tirer une nouvelle argumentation. C'est bien et assurément toujours nécessaires les guéguerres contre les Gatti, Gene et autres de ce monde, mais cela reste des batailles de tranchées, et le discours sceptique risque d'y prendre une apparence de répétition (cela dit, est-il utile de le préciser, sans aucune allusion désagréable à l'endroit des autres sceptiques de ce forum).


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