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Rex:Pseudosciences : le phénomène de société.


Re: Pseudosciences : le phénomène de société. -- Ch.Bertrand
Postée par Jean-Francois , Aug 11,2000,05:33 Index  Forum

Toutes mes remarques sont de l'ordre du "il me semble que". Il s'agit de faire le tour de ta proposition, je ne prétends pas avoir de réponses à celle-ci.

Charles: "Disparition des autorités uniformisant les modes de pensées - que ces autorités soient gouvernementales, scientifiques, religieuses, et autres."

Il y a une disparition des autorités "traditionnelles", mais l'apparition d'une foultitude d'autorités disparates. Globalement, les pensées sont de moins en moins uniformes, en parie à cause de ce que tu dis en 3). La seule autorité uniformisante que je peux voir, c'est le libéralisme.

D'un autre côté, je me demande si l'apparation d'une "nouvelle autorité" est forcément souhaitable?

Charles: "Manque d'objets en lesquels croire, donc manque d'une explication non empirique du monde - Dieu, la patrie, la science telle que vue par les scientistes, et autres."

Dans un reportage récent sur le mouvement skinhead en Europe, les skins interviwés avaient, au contraire, une vision très rationnelle de leurs idées (du moins, ceux qui exprimaient une philosophie articulée et intelligente*). De plus, ils montraient une adhésion inconditionnelle à des idées du type groupe, race, etc. Par contre, il me semble clair que toute leur rationalité se cristallise autour de frustrations diverses**, d'un certain aveuglement volontaire sur les conséquences possibles de leurs idéologie.

La rationalité pure et aveugle ne doit pas être le seul moteur du regard que l'on porte sur les choses. John Saul défend bien cette idée dans "Les bâtards de Voltaire". Par contre, il faut garder les pieds sur terre quand même. C'est pourquoi, arriver à trouver le point de vue adéquat à la situation que l'on vit m'apparait important. Et, pour arriver à cela, il faut pouvoir distinguer les forces et faiblesses des différentes "idéologies" (grilles de lecture dirait, peut-être, Ody?) que l'on peut employer. C'est dans cette optique que je trouve importante la tentative de S.J. Gould de définir ses "magistères" séparés (bien qu'encore très peu aboutie).

Charles: "Par ordre de cause à effet : explosion des frontières, qu'elles soient géographiques, idéologiques, psychosociologiques (mon moi est aussi bon que le tien) ; égalitarisme naissant..."

Ce que tu dis est vrai globalement pour les pays "riches", pas pour les pays moins développés ni pour les grandes zones d'ombre des pays développés.

Remarque: c'est intéressant quand même qu'un principe qui est théoriquement juste et souhaitable (l'égalité) puisse entraîner autant de disparités et d'inégalités pratiques. Tout comme un principe d'"ouverture d'esprit" (accessibilité à une information globale sur le monde) entraîne presque automatiquement l'apparition de mentalités fermées et sectaires.

Charles: "Recul dans l'opinion publique (et serait sans qu'elle ne s'en rende compte) de l'empirisme comme mode de connaissance du monde."

Je ne sais pas, je crois que l'humain est fondamentalement empirique (on fonctionne généralement sous la forme de l'essai-erreur). Là où il y a recul de l'empirisme, c'est quand l'éducation permet (force?) que les idées théoriques aient plus de valeurs que la réalité vécue. Je crois, en plus, que la science n'aide pas (plus) du tout à garder cette "confiance" en l'observation ou en l'empirisme; il n'y a qu'à voir les élucubrations quantiques des zozotériques pour s'en rendre compte. La science a fait en sorte que le monde est de plus en plus conçu (perçu) théoriquement par opposition à ce qu'il est réellement à nos yeux. De plus en plus, la réalité des choses (re)échappe à nos sens, donc la confiance que l'on place en ce que l'on observe est de moins en moins grande. Ce qui cloche (à mes yeux) ce n'est pas tellement l'empirisme, mais le fait que l'empirisme scientifique, dont la valeur est reconnue, soit enseigné comme une théorie et non comme une pratique. On enseigne trop (et pour des raisons parfaitement justifiées de temps et d'énergie) la science pour les résultats actuels qu'elle offre et non pour l'histoire qui a amené à ces résultats. Le problème c'est qu'alors, les résultats/explications échappent à nos sens et à notre réalité, ce qui les rend tout aussi valables que d'autres explications qui sont, elles, totalement dénuées de relation avec la réalité.

Pour résumer: le gros problème de l'intellectualisme pur est qu'il mène tout droit au post-modernisme.

Jean-François

* Ce qui, entre nous, m'a fait froid dans le dos. Bien que ce n'est parfois pas le cas, et je le sais pertinemment, je préfère voir les racistes extrémistes et très violents comme des abrutis infâmes et obtus. Certains des skins interrogés avaient, au contraire, une lucidité et une intelligence réelles. Ils étaient parfaitement responsables de leurs propos et assumaient leurs actes... ce qui les rendaient plus infâmes encore, mais peu obtus.
** Un des skins interrogés, très lucide et articulé dans son discours, disait que pour l'instant il gardait un "profil bas" tout en sachant que sa philosohie finirait par s'imposer. Et que là, alors, "ceux qui [l]'ont fait chier aurait le droit à une balle dans le front", mimique à l'appui.


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