Florence a écrit : 17 janv. 2025, 02:08
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Je débats avec les personnes en recherche de vérité, pas avec les autres si ce n'est pas nécessaire. Indirectement ma réaction peut vous servir pour des échanges futurs.
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Réexaminons l'objet ci-dessous, la lettre à Philosophie magazine.
https://www.leprincipemoteurdelunivers. ... azine.html
J’ai appris avec intérêt que vous alliez animer la conférence d’Étienne Klein, « Qui est légitime à parler du temps ? », le jeudi 19 octobre 2023 à Paris. Si l’on a « le goût du vrai », on doit pouvoir tenir compte de certains « courts-circuits » – quand on les a identifiés – en ne les passant pas sous silence. Or, je me demande si c’est toujours vraiment le cas.
J’ai entendu Étienne Klein dire que « toutes les définitions du temps sont circulaires ». Pourtant, en utilisant la définition du temps d’Aristote, on doit pouvoir contourner cela. Pour Aristote, le temps est le nombre du mouvement, selon l’avant et l’après – nombre dans le sens de ce qui permet de nombrer. Or, Carlo Rovelli nous fait remarquer, en se plaçant dans la perspective d’Aristote, que l’on peut nombrer un mouvement en utilisant un autre mouvement. Par exemple, on nombre le mouvement de tel train par le mouvement de telle horloge, et réciproquement on peut nombrer le mouvement de telle horloge par le mouvement de tel train. À partir de là, il suffit de remplacer « l’avant et l’après », qui sont des notions temporelles, par aller d’un point à un autre pour tel corps en mouvement. En effet, si l’on place un obstacle, on voit bien dans quel sens va le mouvement, sans avoir besoin d’utiliser ces notions temporelles1. On remarque aussi que le rapport entre deux mouvements peut varier en fonction des conditions spatiales. Ce n’est donc pas un retour au temps absolu de Newton. De plus, deux horloges identiques placées dans des conditions spatiales différentes peuvent très bien tourner simultanément à des rythmes différents. On ne peut pas arbitrairement éliminer cette possibilité. Ce qui revient à dire que l’on peut tout à fait, même si l’on remet en cause la conception d’un temps absolu, défendre l’idée d’un instant présent pour l’Univers.
« Depuis 1991, Étienne Klein écrit des ouvrages, essentiellement autour de l’idée que la physique peut obliger à s’écarter des pensées les plus ordinaires, produisant parfois des résultats qui correspondent à ce que Maurice Merleau-Ponty appelait des découvertes philosophiques négatives, au sens où ils modifient les termes en lesquels certaines questions philosophiques se posent2. » Je suis en accord avec cette présentation des choses, à condition de reconnaître que la physique peut, elle aussi, se tromper dans la façon de traiter une difficulté. La philosophie peut, à partir de là, avoir un rôle critique. Je prétends que l’approche philosophique et logique de mon dernier livre, Paradoxe sur l’invariance de la vitesse de la lumière, a des conséquences scientifiques « négatives ». Il démontre que l’on ne peut pas s’appuyer sur la relativité restreinte pour penser l’espace-temps. « Einstein était flegmatique : lorsqu’un livre fut publié sous le titre Cent auteurs contre Einstein, il s’écria : “Si j’avais eu tort, alors un seul aurait suffi !”3. » Je ne suis pas, bien entendu, le seul auteur à relever certaines difficultés, mais encore faut-il parvenir à une démonstration ; or, le raisonnement de mon ouvrage cité supra est incontournable4. Il s’agit de comprendre que la conception de l’espace-temps de la physique, depuis plus de cent ans, repose sur un principe faux, ou du moins inadéquat. À partir de là se pose la question de savoir, une fois remis en cause le postulat de l’invariance de la vitesse de la lumière, sur quels principes une nouvelle conception de l’espace-temps peut être fondée.
« J’admire par exemple beaucoup les subtilités d’analyses d’Étienne Klein, en écoutant avec profit ses diverses conférences, mais il faudra bien à un moment ou à un autre qu’il creuse ce sujet. C’est un point de passage obligé, avec un approfondissement de la notion de causalité, pour un spécialiste de la question du temps. Mais, même s’il admettait la thèse de mon livre Et si Einstein s’était trompé sur un point capital dans son analyse aboutissant à la relativité restreinte ? qu’il a reçu il y a quelques mois, en ayant la compétence voulue en philosophie et en physique pour cerner les tenants et les aboutissants, il est difficile pour lui de prendre position. En effet, il n’est pas si facile que cela d’affronter les a priori en vigueur et d’exposer cette problématique de manière succincte. Cela pourrait d’ailleurs être l’occasion d’un ouvrage, écrit de façon collégiale par des scientifiques et des philosophes, afin de traiter plus parfaitement cette question que je n’ai pu le faire. Mon point de vue étant de dire que, tant que cette problématique n’aura pas été complètement résolue, la physique ne pourra pas parvenir à une théorie générale de l’Univers5. »
En conclusion, on peut remarquer que, si les scientifiques refusent de reconnaître la valeur, pourtant avérée, de certains « courts-circuits », ils limitent leur capacité à cerner des questions connexes plus avancées. Ce n’est pas seulement un questionnement scientifique qui est en cause, mais aussi la possibilité d’un progrès culturel important. Un scientifique peut-il rester un chercheur si, quand il a identifié le bien-fondé d’un raisonnement, il fait comme s’il ne l’avait pas identifié ?
Il apparaît, sans détours, que l'auteur de cette lettre demande expressément à Etienne Klein, ainsi qu'à d'autres auteurs, de réapprendre à étudier et à penser, c'est à dire de revoir leur copie. Se prétendre l'égal de Klein et des autres chercheurs, parce qu'il s'agit bien de cela, il faut oser!
Pour lui, ce n'est pas une possibilité mais une nécessité, ce qui se situe aux antipodes d'une démarche scientifique, mesurée et prudente.
...Ce qui revient à dire que l’on peut tout à fait, même si l’on remet en cause la conception d’un temps absolu, défendre l’idée d’un instant présent pour l’Univers.
Etienne Klein, dans son intervention cf. vidéo citée:
la question du temps
https://youtu.be/XevlFwbSmWw
Transcription de 13'40" à 15'00"
"...Il y a une dynamique du temps qui n'existe pas dans l'espace. Il y a un renouvellement de l'instant présent parce que finalement, à chaque fois qu'un instant présent apparait, il est immédiatement remplacé par un autre instant présent et cetera. Et le moteur de ce renouvellement? c'est ce qu'on appelle le temps et non pas la durée.
Le temps c'est ce qui fait qu'il y a toujours du présent qui est présent sans qu'il ne soit jamais le même. Quel est le moteur de ce renouvellement qu'on appelle le temps?
Réponse: on n'en sait rien.
C'est pour ça qu'on met une flèche. La flèche vient dire: il y en a un, mais on ne sait pas de quoi il est fait.
Est-ce qu'il est physique? Et cetera...
Vous voyez.
Pour résumer, ma réponse à votre question: soit vous dites que le temps dépend de la conscience et là vous devrez affronter le paradoxe de l'ancestralité et je vous souhaite bon courage!
Soit vous dites qu'il n'en dépend pas et vous devrez affronter le paradoxe du moteur du temps: de quoi est-il constitué?"...
Par la suite Klein précise qu'on pourrait s'appuyer sur le langage pour sortir de cette aporie, mais le langage engendre des contradictions insolubles. Le langage doit être abandonné car ce n'est pas lui qui va permettre de saisir le temps.
Ite missa est.
La conclusion s'impose d'elle-même.
"Je débats avec les personnes en recherche de vérité...".
Non, rectifions "Je débats avec les personnes en recherche de
ma vérité."
Il n'existe pas de "vérité", mais un certain nombre de questions dont les réponses engendreront d'autres questions.
L'intégrisme n'a rien à faire dans le domaine scientifique.
Au final, il n'y a rien de nouveau.
Molière, en son temps, avait bien dépeint nombre de travers de son époque... "Le tartuffe ou l'imposteur" est incontournable à ce titre.