"...À la plus récurrente et obsédante des interrogations humaines — Qu’est-ce donc que la vérité? — Nietzsche donne cette réponse provocante : Une armée mobile de métaphores, de métonymies, d’anthropomorphismes... les vérités sont des illusions dont on a oublié qu’elles le sont [1]. La vérité ne serait ainsi qu’un concept forgé pour qualifier d’autres concepts, une simple liaison entre des représentations humaines, et l’instinct de vérité rien d’autre que le masque carnavalesque du travestissement dont l’homme recouvre de pures conventions: Et si la Métaphysique pense la "vérité" comme "adequatio rei et intellectus", c’est parce que l’adéquation qui fonde la "vérité" du jugement est déjà elle-même garantie par une nécessité providentielle qui accorde a priori "l’être" avec les vœux axiologiques de l’homme: l’être est nécessairement bon, vérace, étranger à la douleur, au changement et à la lutte, il doit sceller l’union de la connaissance et de la vertu [2]. Cette illusion dans laquelle nous nous complaisons n’a pour seule raison d’être que de nous assurer le calme et la tranquillité. Toute activité de l’intellect n’aboutit qu’à une autosuffisance orgueilleuse, une vaine vanité par laquelle l’homme s’affirme face à ses semblables. Et quand il désire la vérité, l’homme ne recherche réellement que les agréables conséquences des vérités faciles, en forme de tautologies langagières..."