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Re:Re:Re:Re:Re:R10:La science et l'âme


Re: Re:Re:Re:Re:R10:La science et l'âme -- Jean-Francois
Posté par Mikaël , Sep 06,2002,06:02 Index  Forum

« Moi, je pense que tu as une vision des qualia un peu trop formelle. Tu en fait quelque chose de "concret" alors qu'ils ne le sont pas du tout. Ce n'est pas parce que tu ressens quelque chose que ce quelque chose est concret, à moins que tu ne considères une hallucination (qui est un quale, dans ton acception) comme quelque chose de concret? »

Exactement ! Pour moi une hallucination est effectivement qqch de concret dans la mesure où elle est expérimentée de manière sensible par le sujet et qu'elle ne diffère de la perception que par l'absence supposée d'objet correspondant dans le monde extérieur. S'il n'y avait qu'une seule personne sur Terre, ses hallucinations ne serait pas distinguables de ses perceptions vue qu'il n'y aurait pas d'autres êtres humains pour statuer par consensus de ce qui a une existence indépendante dans le monde extérieur.

« Ton exemple des lunettes montrent, à mon avis, que les qualia visuels sont le produit de l'analyse visuelle. Il atteignent ta conscience parce que ton cerveau analyse la perception visuelle et est
capable de la mettre en relation avec un "sentiment de toi" basé sur ton histoire sensorielle et mnémonique. Si tu changes la perception visuelle en quelques ms tu changes le quale, comment expliques-tu ça si tes qualia sont des choses? »

Je ne dis pas que les qualias sont des choses dans le sens où ils aurait une ontologie particulière, seraient des substances. En fait je ne crois pas en la substance (au moins pour ce qui concerne les qualias et le monde physique), je pense que le concept est inutile et contraire à l'expérience du changement justement. Pour moi tout n'est que phénomènes mais le type de phénomènes correspondant aux qualias n'est pas du même ordre que le type de phénomènes correspondant aux processus neurophysiologiques même si ces derniers conditionnent entièrement et parfaitement la manifestation du type de phénomènes correspondant aux qualias. Je ne suis ni dualiste ni matérialiste ni idéaliste, je suis plutôt phénomènaliste. Pour moi le phénomène est la base de tout.

« Puisque tu es d'accord que le système nerveux est essentiel à l'émergence des qualia, que sont les qualia sans le système nerveux? »

Ils cessent d'exister.

« Je pense que Stéphane a vu juste quand il dit que tu veux absolument qu'il y ait sépration entre l'explication d'un phénomène et le phénomène. Oui, d'accord, mais dans ce cas l'explication ne sert à rien. »

Si car elle permet de mettre en place des relations de causalité (dans le sens de "corrélations orientées"). Le fait que la température cause la dilatation du mercure dans le thermomètre mais qu'on ne puisse pas dire pour autant que : la température = la dilatation du mercure dans la thermomètre, n'est quand même pas qqch d'inutile, si ?

« Je ne vois toujours pas comment tu fais la démonstration que les qualia existent par eux-mêmes. »

Attention, je ne dis pas qu'ils existent par eux-mêmes dans le sens qu'ils pourraient exister indépendament d'un substrat neuronal ou dans le sens qu'ils seraient des substances !

« D'ailleurs, tu ne réponds jamais à mes remarques selon lesquelles ils sont plus un éléments de réflexion qu'une réalité observable. »

Ben il me semblait y avoir répondu en te disant que tout un chacun les expérimente en percevant une odeur, une couleur, etc.

« Rien que le fait qu'un quale particulier soit constamment changeant (une impression de rouge varie constamment quand tu regardes quelques chose de rouge), montre bien que cette notion ne correspond à rien de fixe, de tangible. De plus, les cas de dérèglements cérébraux montrent bien que les qualia ne peuvent absolument pas être séparés de la physiologie neuronale. »

Bien sûr. Je suis d'accord avec tout ça. Donc pour toi, tangible se rapporte à fixe, non changeant, stable, immuable ? OK, j'avais pas compris tu employais ce mot dans ce sens...

« Mikaël: "Mais qu'entends-tu donc par "impression purement théorique", tu me laisses perplexe..."

Oui, je n'ai pas été clair. Ce que je voulais dire c'est qu'elle se sera créé une "impression de rouge" à partir d'autre éléments sensoriels (que la vision en couleur). Un peu comme Helen Keller a "appris" les couleurs par le toucher. Le "quale rouge" de Mary est une aberration si on le compare à celui d'une personne "normale", n'empêche qu'elle à forcément développer une "impression de rouge" pour devenir la "spécialiste mondiale de la vision en couleur". »

OK, mais lorsqu'elle sortira de sa chambre pour voir un objet rouge, Mary expérimentera-t-elle qqch de nouveau qu'elle ne connaissait pas avant, i.e. un qualia "rouge", même très déformé par rapport à celui que la plupart des gens expérimentent ? Si par un moyen artificiel, on avait réussi à conserver à ses aires visuelles tout leur potentiel à se développer, Mary finirait-elle par expérimenter un qualia rouge typique en observant un objet rouge ?

« Mikaël: "Or ces perceptions et cette conscience que l'on a des choses est qqch de concret, tu es d'accord ?"

Si tu entends "concret" dans le sens de "qui a une réalité propre", "qui est réel/tangible/etc.", je ne suis absolument pas d'accord! »

J'entend "concret" dans le sens "qui est une expérience sensible" (un son, une odeur, une couleur, etc. tout ça c'est concret pour moi, même si ces sons, odeurs, couleurs, ne correspondent à rien dans le monde extérieur).

« Les hallucinations, les problèmes de perception, les dérèglements du comportement, etc. etc. etc. sont là pour nous rappeler que les phénomènes de "dans notre tête" ne sont absolument pas concrets. Prend les gens qui pensent dire un mot (par exemple "rouge") mais qui en disent un autre ("jaune") alors qu'ils sont parfaitement capables d'écrire "rouge". Ils sont parfaitement convaincus d'avoir dit "rouge". Où se niche le concret là-dedans? Il y a quelque chose, mais de trop flou et d'équivoque pour être qualifier de concret. »

Si je comprend bien, tu associes "concret" avec "objectif" ?
Ca explique peut-être pourquoi on ne se comprend pas. Dans ton paragraphe, si je remplace "concret" par "objectif" je suis d'accord avec tout ce que tu dis.

« Contrairement à toi, dans le cas du problème posé par Stéphane (le neurologue qui cause le quale "rouge"), ma conclusion serait que la perception de rouge ne peut absolument pas être détachée d'"un certain processus/état physique du cerveau". »

Si entends ça dans le sens que la perception de rouge ne peut pas exister sans un certain processus/état physique du cerveau, je suis d'accord là-dessus.

« Et que de voir une absolue l'hétérogénéité entre "perception de rouge" et "activité cérébrale" ne débouche sur rien d'intéressant. »

Que je parle d'hétérogénéité, je l'entend bien sur un plan purement phénoménologique. Je ne dis pas qu'on a affaire à 2 substances distinctes et que la perception de rouge peut exister sans cerveau.

Mikaël


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