Suivi

Détruire l'idée de Dieu...


Postée par Yves Lever , Sep 17,1999,20:54 Index  Forum

Denys Arcand amorce son film Jésus de Montréal avec cette citation des Frères Karamazov de Dostoievsky :

« Il faut détruire l’idée de Dieu dans l’esprit de l’homme. Alors chacun saura qu’il est mortel, sans aucun espoir de résurrection, et chacun se résignera à la mort avec une fierté tranquille. L’homme s’abstiendra de murmurer contre la brièveté de la vie et il aimera ses frères d’une affection désintéressée. L’amour ne procurera que des jouissances brèves, mais la conscience même de cette brièveté en renforcera l’intensité autant que jadis elle se diluait dans les espérances d’un amour éternel. »

Par toute mon expérience de vie, j'ai 57 ans, je crois en la vérité de ces phrases, ce qui me fait dire (quelques phrases d'un petit livre que j'ai publié il y a une an):

«L’athéïsmecomme premier fondement d'une culture moderne. Mais un athéisme doublé d'une conscience de ce qui fait l'essentiel de la vie. Le romancier russe l'avait fait énoncer par l'un de ses plus forts personnages, bien qu’il ne soit pas sûr qu'il y croyait, car il est revenu à la religion à la fin de sa vie. Arcand, 1ui, y croit. Et moi aussi. L’athéisme seul permet de sortir de la vision animiste du monde et empêche de tomber dans l'avatar moderne qu'elle se donne avec ce courant écologique et pseudo-scientifique qui veut faire passer la terre pour un immense organisme vivant (Gaïa... ) dont chaque chose et chaque être serait comme une cellule.
Toujours dans Jésus de Montréal, quelques minutes après la citation de Dostoievski, le commentaire d'un film sur l'astrophysique livre le second principe culturel fondamental: la connaissance de l'histoire de 1'univers depuis le big bang. Le texte (collage de citations, dit un personnage du film) s'achève ainsi: « Dans cinq milliards d’années, notre soleil aura épuisé son carburant nucléaire. Notre terre retournera au gaz galactique dont elle a été formée. Mais il y aura déjà longtemps que nous serons disparus. Le monde a commencé sans l’humanité et il s’achèvera sans elle. La durée de la vie telle que nous la connaissons n’aura été qu’un minuscule instant, pendant lequel nous aurons existé et, à la disparition du dernier esprit sur la terre, l’univers n’aura même pas senti sur lui le passage d’une ombre furtive. (Collage de citations, dit un personnage du film.). » (En 1981 après une présentation des origines de l'univers par Stephen Hawkins, Jean-Paul II a déclaré: « Les savants ne doivent pas s'occuper du big bang car c'est le moment de la création et donc l'oeuvre de Dieu. »)

Quand on a une telle vision de la vie personnelle et de celle de l'univers... Quand on a eu la chance d'avoir une vie qui permet de dire qu'on a jusqu'à présent joui de presque tout ce que la vie humaine peut offrir de meilleur, on a une vision très sereine de la mort, même si on continue à croire que c'est une expérience très «platte», comme on dit au Québec, pour signifier ce qu'on n'a pas envie de vivre, qui est sans saveur et qui n'a pas en soi de sens. Bon, on passera par là quand le temps viendra...

En attendant, le sens de la vie est ce qu'on décide qu'il sera, à la suite du vécu qu'on a avec la vie amoureuse, avec la vie professionnelle, avec les amis, avec la connaissance du monde et de l'univers qui nous entoure, avec le dynamisme de la vie qui nous pousse à vivre toujours mieux et davantage, ce qui n'est pas sans limite, mais ce qui est toujours possible.

Merci à Gilles Bourbonnais pour ses dernières interventions, et notamment pour la citation sur le blasphème.


Suivi