Je suis bien d'accord René, mais aussi je l'avoue, préoccupé par l'ampleur insoupçonnée de ce phénomène d'imprégnation. Non pas par la multiplication de Gattis (qui soit dit en passant est un hybride fort sympa qui cherche néanmoins, dans tout ce capharnaüm instinctif, une preuve, une démarche cohérente, avec ses moyens) mais par ce médecin qu'un autre décrivait ici dernièrement, qui «laisse aller» le para-médical vers des techniques douteuses, faute de réponses scientifiques ou de gestes médicaux à porter. Par ce voisin qui, d'un simple effort de concentration, croit avoir fait disparaître un cancer des os à son chien. Et par ce beau-frère qui décide finalement de rompre avec sa nouvelle copine, une «sagittaire / rat», se rendant à l'évidence que cette personne nuit, par la force des choses (lire l'heure de sa naissance) à son évolution et à son «éveil à la conscience cosmique».
À une époque on rêvait en lisant du Rampa et en fumant un bon joint. Maintenant les Coehlo, Castaneda, et autres romanciers saupoudrent du rêve à bon marché et à grande échelle à coup de millions d'exemplaires, dans des sociétés boiteuses qu'on le veuille ou non, et ces rêves, tout simples, une trop large partie de l'occident les prend de plus en plus pour de la réalité.
À mon avis ce qu'il faudrait vulgariser ce n'est pas tant la science, que la démarche scientifique elle-même. Beaucoup de gens ne font plus la différence entre une anecdote et une étude rigoureuse dont les résultats sont ensuite validés aux quatre coins de la planète. La preuve elle-même est à l'index, le jugement, l'objectivité, et le libre-arbitre deviennent «personna non gratta» dans cet univers de l'irrationnel et du «senti» que de plus en plus de gens prennent négligemment pour acquis.
Et dans tout ce fatras où les fondements même de l'entendement humain sont occultés insidieusement, voire sapés à la base, certes les «Gene» se multiplient, mais ils ne sont que la fine pointe apparente d'un mouvement beaucoup plus vaste qui s'ignore encore lui-même. L'effritement des dogmes religieux a libéré une place énorme pour de nouvelles cultures, une place qui aurait pu être utilisée à bon escient par la science, mais sa lenteur à occuper les lieux (de par sa rigueur intrinsèque, son honnêteté lente), combiné au fait que la nature (humaine) a horreur du vide, auront fait en sorte que le terrain est rapidement occupé par des herbes envahissantes, étouffantes.
Le plus étonnant dans tous ça c'est que les chercheurs scientifiques eux-même, attelés à leur microscope ou à leur téléscope, qui publient leurs travaux, alimentent sans le savoir le discours ésotérique en «matériaux bruts» qui seront savamment raffinés et dilués, pour en faire un «résonnement» homéopathique contre les maux de la rationalité. Et ce médicament-là, à l'instar des autres granules et gelules, est d'une efficacité.. endémique.
Alors devant tout ça, qu'on se bidonne, moi je veux bien. C'est pas cher la livre, c'est parfois très rigolo, et moi ça me détend en sirotant l'apéro pendant que je navigue d'un site zozo à l'autre. Mais peut-être y a-t-il aussi autre chose à faire. Et peut-être est-ce urgent.
Peut-être que non, remarque.
Salutations
Korg