Si on veut trouver Darwin dans la culture, n'en déplaise aux «sociologues» et «psychologues» de l'évolution aux É-U, il faut creuser assez loin: je pense qu'il faudrait aller jusqu'à la simple capacité humaine de conceptualiser l'expérience empirique (plutôt que de simplement l'automatiser comme les animaux). Cette capacité de conceptualiser permet de comparer les choses et de tirer des conclusions sans avoir à faire absolument toutes les expériences possibles. Ceci est un avantage évolutif assez énorme: la capacité d'extrapoler et de prévoir. Dès qu'on développe cette capacité, on structure la réalité en métaphores (cad des généralisations dérivées d'expériences ponctuelles) liées par des «explications» ou une certaine logique narrative.
Toute notre réalité quotidienne est conceptualisée d'après la façon dont nous pouvons et/ou ne pouvons pas interagir avec elle, c'est-à-dire prendre des décisions et passer aux actes pour obtenir un résultat désiré. Donc quand nous demandons, «pourquoi ceci a-t-il été fait» nous désirons un exposé des intentions des acteurs et jamais seulement une suite causale--en fait cette question se pose généralement le plus clairement *après* qu'on soit informé des détails de la suite des évènements. Quand on pose cette question au sujet phénomènes naturels ou accidents, on impose une intention, un sens anthropomorphiques au monde physique. On demande, quelle est la raison, quelle est la signification de cet évènement, ce qui mène assez facilement à la création d'une mythologie, d'un panthéisme ou d'un déisme quelconque, selon l'endroit, puisqu'on cherche spontanément à expliquer la nature comme nous nous expliquons nous-mêmes.