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Réponse à Julien : fossiles, symbioses, Archeopteryx et tutti quanti


Posté par Platecarpus , Jun 30,2002,16:16 Index  Forum

>L’avis des experts n’a aucune valeur ?

Leur avis a une valeur, leurs citations n'en ont aucune. On peut faire dire ce qu'on veut à n'importe qui du moment qu'on décontextualise ses propos.

Très concrètement, comme l'a déjà signalé Gilles avec justesse, lorsqu'un expert reconnu (ce que David Menton n'est pas, loin de là) écrit : "Archaeopteryx était un authentique oiseau", il n'y met absolument pas le sens que vous voudriez y voir. Cela signifie simplement qu'Archaeopteryx était un proche parent des oiseaux actuels - donc qu'il a une valeur pour comprendre leur évolution. Il ne s'agit pas d'un cas de convergence (au choix, un dinosaure particulier mais sans réel intérêt évolutif ou un oiseau ayant "par hasard" acquis quelques caractères qui peuvent rappeler ceux d'un reptile). Si je mets à part quelques marginaux (Feduccia...), qui considèrent que c'est effectivement une convergence, les paléontologues sont unanimes pour reconnaître sa valeur de mosaïque évolutive. C'est cela que signifie la phrase "Archaeopteryx était un vrai oiseau" ; elle n'est pas destinée à nier son statut de forme transitoire, mais au contraire à l'affirmer avec plus de vigueur.

Des détournements de ce genre peuvent être faits sur pratiquement tous les sujets et avec tous les auteurs. C'est pourquoi j'affirme que les citations n'ont aucune valeur : ce que les experts pensent vraiment en a une (et elle est considérable), mais l'usage de petites phrases décontextualisées est un type d'argumentation que je laisse aux créationnistes.

>Je vous ai clairement montré que les experts s’entendent pas très bien sur Archæoptéryx.

Ils s'entendent très bien, si, justement. Vous avez clairement montré que l'on pouvait argumenter en décontextualisant des citations (ce qui évidemment ne vaut rien sur le plan scientifique) de chercheurs reconnus, ou en dénichant LE scientifique marginal qui a une opinion peu courante. Mais si on prend la peine de regarder derrière les mots, au-delà des petites phrases, on se rend compte qu'il n'y a rien de factuel dans votre argumentation.

>Voici ce que rapporte Dr David Menton (anatomiste) sur une conférence qui porta justement sur le sujet :

Là aussi, Gilles a fait une excellente réponse : Menton, qui est créationniste, a visiblement fait un compte-rendu très personnel de la réunion. Ce qui est sorti dans _Nature_ à ce sujet en donnait une vue nettement différente. Encore un mauvais usage de citations...

>Votre affirmation est plutôt à l’opposé du consensus. De plus, il ne s’agit pas de quelques marginaux ici, mais d’un rassemblement officiel des experts sur l’évolution des oiseaux. Qui dois-je croire entre vous et eux ?

Si vous pensez que "croire" relève d'une démarche scientifique, vous vous trompez lourdement. Mais revenons au fond du problème : vous avez essayé de faire dire aux experts le contraire de ce qu'ils disent vraiment, en usant de trois procédés (décontextualisation, citation de chercheurs marginaux, recours à un biologiste créationniste qui s'est lui-même chargé de déformer les choses). Ca ne marchera pas, tout simplement parce que mes affirmations _sont en accord avec le consensus des experts_. Je base mon argumentation sur l'étude du fossile lui-même (parce qu'un seul fait vaut plus, en tant qu'argument, qu'un million de citations), mais je connais aussi les résultats des travaux paléontologiques effectués à son sujet. Il y a un consensus indéniable pour considérer Archaeopteryx comme une forme intermédiaire, et ce n'est pas deux tours de voltige rhétoriques (comme le fameux "Archaeopteryx is a true bird") qui y changeront quelque chose. Une analyse du fossile lui-même aurait déjà plus de valeur, mais vous n'en avez fait aucune (au demeurant, le caractère intermédiaire de la bestiole saute aux yeux dès qu'on prend la peine de la regarder).

>Vous aviez affirmé que la biologie avait confirmé que des intermédiaires* n’existaient pas, faisant ainsi de la théorie de l’évolution une théorie invérifiable. Changez vous d’avis ?

Le mot "les intermédiaires" ne veut en soi strictement rien dire. J'ai déjà expliqué deux messages plus haut pourquoi il valait mieux l'éviter, parce qu'il laisse planer un flou considérable sur ce dont on parle : de caractères, d'espèces, d'autres taxons ? De fossiles, d'organismes vivants ? Bien sûr, dans un colloque scientifique sur la théorie des équilibres ponctués, on peut employer ce genre de raccourcis car tous les participants savent de quoi ils parlent (en l'occurrence, d'espèces) ; mais dans un contexte plus général, il est nécessaire de préciser, sans quoi on nage dans le brouillard (la confusion entre "formes intermédiaires" des différents types est d'ailleurs très profitable aux créationnistes, qui n'ont plus qu'à extraire une citation de son contexte - exemple : un colloque de ponctualistes - et la replacer dans un autre pour donner à la phrase un sens totalement différent).

J'ai parlé des trois niveaux, et ce de manière sensiblement différente. J'ai expliqué qu'au niveau des caractères, certaines transformations n'avaient nécessité que peu ou pas de formes intermédiaires, parce que la biologie moderne avait confirmé qu'elles ne nécessitaient que très peu de mutations (exemple : l'apparition des ailes chez les insectes ou des doigts chez les premiers tétrapodes, qui nécessitent juste de décaler l'expression de quelques gènes). Ce n'est pas le cas de toutes (l'apparition de l'oeil humain, très complexe, à partir d'un organisme aveugle a nécessité une quantité énorme d'intermédiaires - que l'on connaît effectivement - et la mise en jeu de toute une batterie de gènes). Au niveau des espèces, j'ai expliqué que les intermédiaires étaient généralement peu abondants - ce qui correspond à ce que nous savons, grâce à la biologie toujours, des mécanismes de la spéciation. Enfin, aux niveaux plus hauts de la classification (genres, familles, ordres, etc.), nous disposons toujours d'une foule d'espèces intermédiaires (Archaeopteryx entre les reptiles et les oiseaux, Panderichtys entre les poissons et les tétrapodes, les cynodontes entre les reptiles et les mammifères...).
Ces trois niveaux se juxtaposent et interagissent, mais doivent être nettement distingués. Au niveau des caractères, la question doit même être examinée au cas par cas en fonction de ce qu'on sait des organismes contemporains au niveau génétique.

>Rappelez vous que vous avez été incapable de me donner un seul exemple clair de gradualisme.

J'ai déjà cité les campagnols du Quaternaire et les ammonites du Jurassic inférieur. Vous n'avez pas répondu à ces deux cas de gradualisme clairs et bien établis (que les ponctualistes reconnaissent parfaitement). Je les maintiens...

Ne me répondez pas en affirmant que l'on n'a pas de gradualisme dans l'évolution d'autres taxons : je sais que certains obéissent à un mode ponctualiste, et que d'autres sont très mal conservés dans les archives fossiles. Tous ces cas de figure existent.
Par ailleurs, je rappelle que l'expression "gradualisme phylétique" s'applique au niveau des espèces. Au niveau des caractères ou des groupes plus vastes, on ne parle pas de gradualisme : il faut utiliser d'autres formulations, sous peine de laisser le flou s'installer.

>Le créationnisme prédit une discontinuité du monde du vivant sans prédire qu’il n’y ait pas quelques cas que l’on ne saura classifier.

Très fort : "le créationnisme ne prédit pas qu'il n'y aura pas d'exceptions". Avec ce type d'arguments ("la théorie ne prédit pas qu'elle ne sera pas réfutée" - ce qui revient à dire qu'elle reste juste même si elle est réfutée, puisqu'elle n'a pas prédit le contraire !), on peut faire passer tout et n'importe quoi.

>La discontinuité des espèces et l’explosion de formes de vies au cambrien dans le registre fossile appuie *directement* la création

Non, absolument pas.
Les espèces, en tant qu'entités discontinues, existent souvent dans les archives fossiles. C'est un fait. Il n'appuie pas le créationnisme pour deux raisons :
1 - Il était prédit par la théorie de l'évolution.
2 - On voit nettement les espèces se succéder dans les archives fossiles ; elles ne surgissent pas toutes en mêmes temps. Le créationnisme prédisait le contraire. Qu'une espèce puisse rester en stase, puis être remplacée assez rapidement par une autre, correspond à ce que la théorie de l'évolution prédisait en termes de spéciations. Ca n'a rien à voir avec "l'apparition simultanée" qu'un créationniste aurait voulu voir.

Parlons maintenant de l'explosion des formes de vie au Cambrien. Contrairement à ce que sous-entendent souvent les créationnistes, celle-ci n'a pas été "instantanée" ; elle a simplement été très courte, ce qui n'est pas la même chose. Il ne s'agit pas simplement d'une chicanerie sémantique : géologiquement parlant, l'explosion cambrienne s'étale sur une vingtaine de millions d'années, ce qui est très peu. Mais ce n'est pas pour autant qu'elle correspond à ce à quoi on s'attendrait si les fossiles avaient conservé les traces d'une création simultanée.

Précisons d'abord de quoi il s'agit exactement : l'explosion cambrienne est un phénomène relativement court, qui est conservé dans les archives fossiles datées de - 520 à - 540 millions d'années. Il correspond à l'apparition d'une vingtaine d'espèces animales ; cela semble ne rien avoir d'exceptionnel a priori. Cependant, ce qui est étonnant, c'est que ces créatures sont souvent les premières représentantes d'un grand groupe vivant (un "embranchement") qui n'existait pas avant. Par exemple, les premiers arthropodes, comme les premiers chordés, mollusques et échinodermes datent tous de cette époque. C'est là que se sont définis, à travers quelques espèces seulement, la plupart des grands plans d'organisation connus (plus quelques plans originaux, ne correspondant à aucun embranchement encore vivant, qui apparaissent là puis disparaissent sur place ; jamais rien de tel ne se reproduira par la suite).
Mais il ne faut pas donner à l'explosion cambrienne une ampleur supérieure à celle qu'elle a réellement eu : nombre d'embranchements (en particuliers chez les diploblastes, animaux à deux feuillets embryonnaires) existaient déjà (faune d'Ediacara, -600 millions d'années). Les premiers animaux sont d'ailleurs bien plus anciens (les plus vieux fossiles que l'on a montrent des créatures très simples - des sortes de "sacs de cellules" à côté desquels une éponge paraîtrait élaborée).
L'explosion cambrienne n'appuie pas la création. Elle ne correspond pas à l'apparition ex nihilo de tous les embranchements animaux dans un univers peuplé de bactéries ou d'algues, comme certains le laissent parfois entendre : certains embranchements existaient déjà bien avant. Quelques triploblastes (animaux à 3 feuillets embryonnaires), simples et peu diversifiés, étaient d'ailleurs déjà apparus dans les environs de -600 millions d'années.
Certes, plusieurs plans d'organisation différents, inexistants auparavant, sont apparus dans un intervalle de 20 million d'années, ce qui, en effet, est très bref. Mais les espèces de l'époque, même si elles seront à l'origine de groupes aussi éloignés de nos jours que les vertébrés et les insectes, étaient alors très proches. Seuls certains éléments du plan d'organisation, que l'on retrouveraient chez tous leurs descendants, les différenciaient. La diversification qui a creusé de plus en plus le fossé entre les embranchements est intervenue plus tard.

Assimiler l'explosion cambrienne à une création spéciale est encore une trahison de la véritable nature du phénomène. Celui-ci a été relativement rapide, mais pas instantané ; il a représenté une étape majeure de l'histoire de la vie, mais d'autres étapes-clés s'étaient produites bien avant ou se produirent bien après.
De toute façon si, comme je l'ai compris, vous refusez toute pertinence aux archives fossiles pour nous indiquer la chronologie de l'histoire de la vie, l'explosion cambrienne ne peut pas vous servir d'argument. Si toutes les créatures du Cambrien se sont fossilisés (comme toutes les autres) suite à un Déluge universel, elles ne peuvent pas être des vestiges de la création. Votre argument ne serait de toute façon pas recevable dans le cadre même de votre système de pensée (dans le cadre évolutionniste, comme je l'ai déjà montré, il ne vaut pas grand-chose non plus).

>La théorie [créationnistes] ne prédit pas une fixité du caractère morphologique après son apparition. [...] Elle prédit que l’aile de l’oiseau autant que l’écaille du reptile resteront toujours ce qu’il sont.

D'accord. Donc ils ne sont pas fixes, mais ils restent ce qu'ils sont. Je propose personnellement une théorie de l'antigravité, où les pommes tombent mais restent immobiles.

>et CONSERVERONT LEUR FONCTION première. Ils ne subiront pas de modification qui changerait éventuellement leur fonction.

Rien n'impose biologiquement qu'un organe ne puisse pas changer de fonction. Si vous prenez un oiseau aptère comme le moa (Dinornis maximus) ou le kiwi, où les plumes n'ont qu'une fonction thermorégulatrice mais ne servent pas au vol (contrairement à ce qui se passe chez les autres espèces), il y a évidemment détournement de fonction. Je pourrais multiplier les exemples d'espèces où les caractères communs aux autres membres du groupe servent une toute autre fonction : les plumes du paon qui servent à la parade nuptiale, les nageoires de certains poissons (périophtalmes) qui leur permettent de courir littéralement sur le sol au lieu de nager, les oreilles qui servent à la communication chez l'homme et à la localisation chez la chauve-souris, les ailes du manchot qui font office de palettes natatoires... Des organes très peu différents sur le plan tant génétique que morphologique peuvent être employés pour des fonctions complètement distinctes suivant les espèces. Il n'est pas difficile de comprendre comment un "glissement de fonction" a pu s'effectuer en peu de mutations et en fonction du milieu. Certaines mutations de gènes régulateurs peuvent d'ailleurs modifier complètement la morphologie de l'organe : j'ai déjà cité l'exemple des ailes des insectes, qui sont des sacs respiratoires à peine "bricolés" génétiquement.
Cette idée de la théorie créationniste a donc tous les caractères d'une affirmation gratuite. Elle proclame comme impossible un phénomène qui visiblement PEUT se produire. Elle nécessite une explication surnaturelle très coûteuse en hypothèses infondées là où des causes naturelles suffisent visiblement à expliquer ce qu'on observe. Si l'on admet le principe de parcimonie (doit être adoptée la théorie qui nécessitera le moins de mécanismes n'ayant jamais été observés), je crois que je n'ai pas besoin de m'étendre sur la valeur scientifique d'une telle vision des choses...

>Si tel était le cas, ils seraient éliminés par la sélection naturelle bien avant.

Affirmation gratuite 2.

>« dinosaure à plumes » Bon, bon, on voit le caractère anti-scientifique de l’évolution qui fait surface. Ce ne sont habituellement que des filaments, un genre de duvet, que l’on a observé.

Manque de chance, on a des spécimens de Dromaeosaurus qui portent d'authentiques plumes bien ramifiées. On en a aussi, en effet, des dinosaures qui ne portent qu'un petit duvet ; mais de vraies plumes ont déjà été observées.

>Le mot « plume » est une extrapolation de la croyance.

Contrairement au mot « Dieu » qui n'a rien à voir avec la croyance, correspond à une réalité empirique solidement fondée et est parfaitement réfutable dans le cadre d'une épistémologie popperienne. Tout à fait d'accord ;)

>Et puis ce n’est pas parce que des dinosaures à plume aurait été trouvés que ça vous avance. Tout ce qui serait démontré est que des dinosaures à plume ont existés.

Ca, c'est très profond. En effet, si on voit un dinosaure à plumes, ça prouvera qu'il y a des dinosaures à plumes. Quelle puissance dans l'analyse !

>Fait banal pour la science objective.

Si par "science objective" vous entendez "constatation plate de ce que l'on observe sans chercher à le comprendre", c'est tout à fait banal, en effet. Seulement, une telle manière d'appréhender les choses ne mériterait plus tellement le nom de "science".

>Il ne s’agit pas de la preuve d’un gradualisme entre dinosaure et oiseau.

En soi, non. Mis en relation avec une foule d'autres intermédiaires (Archaeopteryx et ses congénères entre autres), cette découverte est une preuve écrasante du passage des dinosaures aux oiseaux (le mot "gradualisme" est ici mal choisi car on ne parle pas du niveau des espèces).

>« Ichtyornis » Bon, un oiseau avec des dents, so what ? Il y a d’autres espèces d’oiseaux qui ont des dents ! Et puis, beaucoup de reptile n’ont pas de dents! Seul le groupe des crocodiles ont des dents bien développées.

Tout le monde sait que les lézards et les serpents sont complètement édentés, en effet. De même d'ailleurs que les dinosaures ; le Tyrannosaure avait des quenottes de 14 cm, est-ce qu'on peut vraiment appeler ça des dents ?

>Sur quelle base peut-on affirmé que les dents sont des caractères reptiliens. Pourquoi pas des caractères des mammifères ?

Tout simplement parce que l'Ichtyornis avait des dents _de reptile_ et même de dinosaure. Je ne pense pas avoir besoin de vous faire un dessin pour que vous compreniez que les dents des reptiles n'ont pas grand-chose à voir avec celles des mammifères qui ne se rapprochent guère de celles d'un poisson.

>Et de toute façon, tout ceci est très subjectif...

Je suis d'accord, un oiseau avec des dents, tout comme un dinosaure à plumes ou un reptile muni d'ailes capable de voler, c'est complètement subjectif. Rhétoriquement. Pas factuellement.

>rien à voir avec une preuve scientifique d’un gradualisme entre reptile et oiseau.

Bon. Si une longue série d'intermédiaires (nous n'avons discuté ici que des trois plus évidents, il y en a d'autres encore) ce n'est pas une preuve de la transition dinosaures->oiseaux, alors quoi ? Il faudrait mettre un lézard dans une cage et attendre qu'il se transforme en oiseau, c'est ça ?

>Je redemande encore de voir le gradualisme qui a mené une écaille à se transformer en aile.

Vous ne vous souvenez pas que c'est vous qui avez mentionné l'existence de dinosaures à duvet ? Un duvet très proche de celui des oiseaux, même s'il n'avait pas tous les caractères d'un véritable plumage ? Si ça ne vous convient pas en tant que stade intermédiaire (puisque les dinosaures avec de vraies plumes ne vous convaincront sûrement pas, eux) je ne sais pas ce qu'il vous faut.
Par ailleurs, la question ne pourra être tranchée que lorsqu'on connaîtra avec précision les gènes impliqués dans la formation des plumes chez les oiseaux. Là, on verra quelles mutations ont été nécessaires pour les faire émerger à partir des écailles.

>Un oiseau avec des dents ne me dit rien en soit, ni même un dinosaure avec un « duvet bizarre ».

Si "ça ne vous dit rien", tant pis pour vous. La plupart des scientifiques les trouvent au contraire très parlants. Maintenant, vous pouvez considérer qu'aucune preuve n'en est une, que les fossiles ont pu être déformés, truqués, que de toute façon un oiseau avec des dents c'est subjectif, que le Dogme dit le contraire et qu'il y a un chercheur isolé qui croit qu'Archaeopteryx n'est pas transitoire. Mais je crains que ce ne soit pas très convaincant.

>Certains fossiles échappent à nos règles de classification...

Si on admet une vieille classification typologiste, oui. Si l'on admet l'évolution, non (je pense en particulier à certaines méthodes de classification, comme la classification phylogénétique, qui se basent sur l'arbre généalogique des espèces) ; au contraire, on peut même prédire l'existence de ces fossiles qui "échappent" aux théories fixistes.

>ça ne leur donne pas pour autant un statut transitoire, à moins que la transition est été préalablement prouvée comme s’étant vraiment opérée.

Comment voulez-vous prouver que la transition s'est opérée si vous n'en avez aucune trace ? Les traces fossiles sont les seuls objets qui permettent de _constater_ objectivement une transition : il n'y a pas de preuve plus directe. C'est comme si je disais : "Voir les pommes tomber ne prouve pas l'attraction terrestre, à moins que celle-ci ait été préalablement prouvée".

>Les cristaux, lorsqu’ils sont brisés, ne diminue pas de niveau d’organisation.

Si, justement. Si je réduis un cristal en morceaux et que j'entasse toutes ses molécules dans une boîte à chaussures, en le privant d'apport d'énergie, il ne va pas se reconstituer spontanément. Le système a bien diminué en termes de niveau d'organisation - ce qui est tout à fait prévisible, puisque, tel que je le décris, il obéit à la 2loT.
Un cristal est un système incontestablement ordonné, organisé - et ce n'est possible que parce qu'il bénéficie d'un apport d'énergie. Si je le réduis en morceaux, sont niveau d'organisation va bel et bien diminuer, et il ne se reconstituera spontanément que si je fais diminuer l'entropie en lui fournissant l'énergie adéquate.

>L’arrangement cristallin ou ordonné est en fait moins demandant en énergie...

Où avez-vous lu des bêtises pareilles ? Dans "Création Québec" ? L'arrangement cristallin "ou ordonné" n'émergera QUE SI l'on fournit beaucoup d'énergie au système - justement parce qu'il en est très demandant. En l'absence de réserves énergétiques à l'extérieur, le cristal ne se formera pas : le système restera dans un état désordonné, qui correspond à la faible quantité d'énergie dont il dispose.

>L’arrangement des molécules organiques est très exactement à l’opposé sur ce point. Les différentes parties interagissent ensembles. Si la complexité est définie de cette façon (interaction entre plusieurs parties du système) et bien il n’y a plus aucun exemple qui existe pour justifier l’émergence naturelle de tels systèmes.

Bien sûr. Les molécules n'interagissent pas entre elles. Les parties déjà formés d'un cristal n'influencent pas l'organisation des autres parties qui s'édifient au-dessus. Dans un cristal d'argile, rien n'est interdépendant (au passage, c'est justement tout le contraire : la structure de chaque partie du cristal, déjà formée, conditionne complètement celle du reste de l'objet en train de s'auto-organiser).

>La matière tend toujours vers l’état énergétique le moins demandant.

Prix de la Loi Scientifique Bidon ! Enoncé comme cela, ça a l'air vrai : on a l'impression de se retrouver en pleine thermodynamique croisée avec une théorie de l'information. Seulement, quand on connaît un peu les disciplines concernées, on sait qu'aucune loi n'énonce quoi que ce soit dans ce genre. Mieux, les observations prouvent même tout le contraire.
Revenons à nos systèmes auto-organisés : ils ne s'organisent que si on leur fournit beaucoup d'énergie. Sans cela, ils restent dans un état désordonné, car _celui-ci est énergétiquement beaucoup moins demandant_. Mais si on fournit au système un supplément d'énergie, il ne dit pas non ; il ne va pas rester dans un état chaotique sous prétexte que c'est moins coûteux en énergie. Il va allégrement dilapider ce qu'on lui donne, et ce uniquement pour former de belles structures ordonnées (comme les cristaux d'argile ou les structures dissipatives de Prigogine) qui vont faire diminuer son entropie (et démontrer la non-pertinence de la 2loT dans les systèmes ouverts).

>Ok, il peut être attiré par autre chose, mais il doit être attiré, l’attirance est une des « parties » du système irréductible. Un animal qui se pose sur le végétal sans avoir d’intérêt n’est pas un pollinisateur pour la simple raison qui ne transportera pas nécessairement la spore à l’organe femelle.

Pas _nécessairement_, mais occasionnellement. Par la suite, le système peut évoluer vers un état où le transport sera de plus en plus fréquent, puis permanent...

>Et bien dans l’exemple concret que j’ai donné, c’était le cas [l'animal devait se rendre à la nourriture pour polliniser]. Donc, il est bien question ici d’une partie du système irréductible.

Non : une symbiose peut exister sans que ce ne soit le cas. La symbiose actuelle "orchidée+papillon Xenanthropus morgani", où l'animal se rend à la nourriture, a pu évoluer à partir d'une symbiose où il ne le faisait pas.

>Les plantes mutantes sont minoritaires lorsque le changement apparaît. Disons 0.5 % de la population.

D'accord.

>Il est alors très difficile pour le papillon déjà minoritaire de trouver sa nourriture.

Non, puisqu'il pollinise aussi les non-mutantes, mais _beaucoup moins parce qu'elles l'attirent moins fortement_. C'est ça qui est important.

>Il doit parcourir plus de distance et doit nécessairement et invraisemblablement avoir l’aptitude de repérer les mutantes...

Je vous rappelle que la mutation dont je parlais _rendait la fleur plus attirante pour le papillon_. X. morgani sait donc les repérer par hypothèse : c'est d'ailleurs la seule particularité de ces mutantes.

>Enfin, il y a des types de symbiose par milliers dans la nature. La théorie créationniste a la vertu de s’appuyer sur des phénomènes observés pour valider ses hypothèses.

Ca c'est le pompon ! La création spéciale et surnaturelle, c'est un phénomène observé ? On aura tout vu...
En revanche, on a déjà observé des mutations, la sélection naturelle, la dérive génétique, des remaniements chromosomiques, des spéciations... L'évolution ne nécessite pas d'autres mécanismes. On a même déjà observé la mise en place d'une symbiose parfaite, qui à première vue (mais à première vue seulement) semble être irréductible, à partir de deux organismes qui s'ignoraient superbement (voire dont l'un parasitait l'autre). Ce n'est donc pas impossible, et avec les générations, les symbioses observées (dans la nature et en laboratoire) sont allées en se perfectionnant, allant jusqu'à atteindre un niveau de sophistication dont n'importe quel créationniste aurait tiré argument si on ne l'avait pas vu apparaître progressivement.


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