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Re:(X):Eliade et l'horreur: deux livres: une accusation et la défense


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Postée par Mondreiter , Jun 07,2000,19:20 Index  Forum

Rebonsoir!
Puisque vous avez repris certains passages précis, dont mon interprétation suscitait une réaction, je me permettrai de tenter de répondre point par point. On peut toujours essayer, après tout.
En préalable général, j'ai vraiment de plus en plus l'impression qu'il y a un problème lié à l'utilisation même du langage. Ce n'est pas un scoop, je le sais bien, mais il semblerait qu'en ces matières, la sensibilité individuelle, les présupposés de chacun, son histoire personnelle en somme, influe considérablement sur l'interprétation que vous où moi donnons au même passage. Il est dommage qu'Eliade nous ait quitté, car en définitive, je crains bien qu'il ait été le seul à pouvoir trancher. Enfin, c'est comme ça…
Passons au corps de votre analyse.
"Aux notions que je viens de citer venant du Judaïsme, il faut ajouter pour le Christianisme celle de l'Espérance".
C'est bel et bon, mais ce qui caractérise ce que j'appelle le "second groupe", c'est précisément cette notion d'espérance (ou d'espoir) pour "après". Le Paradis (qui n'est dans ma lecture de ces textes rien d'autre qu'une réintégration définitive ou temporaire dans l'état des origines, bien qu'Eliade souligne que ce n'est pas la thèse soutenue par le christianisme [in "La nostalgie du Paradis"]), c'est toujours pour après la mort physique. La notion d'espérance devient alors non seulement dangereusement illusoire (après tout, il ne s'agit que d'une hypothèse de survenue d'un état idéal toujours futur), mais elle devient également, comme l'avait en son temps souligné Marx, un outil extrêmement puissant de domination des corps et des âmes! Par contraste, le Chaman, le Druide ou la Prêtresse qui guérit ici et maintenant une maladie du corps ou de l'esprit ne se contente pas de promettre: il fait. Il ne donne pas de l'espoir, il réalise, il transfère au plan de tous les jours (historique) les possibilités (les pouvoirs?) qu'il a ramenés du plan où existe le Grand Temps. [Juste une incise, hors de la réponse: l'expression Grand Temps d'Eliade me paraît mal choisie. Cela évoque pour moi non une époque datable, mais un sous-univers atemporel, donc éventuellement contemporain de l'univers "historique". C'est cela qui donne à cette partie atemporelle de l'univers envisagé dans son ensemble une actualité utilisable. Je sais que c'est une notion difficile à faire passer à l'aide des simples ressources du langage. Je fais ce que je peux!] Le chaman est selon Eliade celui qui est capable de faire le voyage aller et retour de la terre au ciel, donc, selon mon interprétation, celui qui sait "passer les portes" entre ce monde-ci, historique, soumis à l'écoulement du temps, et cette autre "zone" qu'Eliade nomme le Grand Temps. Aussi l'espoir apporté à l'homme de base par les pouvoirs prêtés au Chaman se situe-t-il dans le présent historique. C'est une source à laquelle on peut aller boire en toute occasion. Dans les monothéismes issus du Moyen-Orient, c'est toujours pour "après", jamais pour "tout de suite"! Je comprends que l'Espérance soit une des vertus cardinales, car sinon, tout l'édifice s'écroule, et les croyants se compteront bientôt sur les doigts d'une seule main. Quoique, lorsqu'on voit à quels non-sens se raccrochent les disciples de Moon ou les TG, on peut légitimement se dire que du moment que le papier est doré et la ficelle rose vif, le contenu du paquet n'a pas tant d'importance…
Second point : "C'est un espoir d'angoisse, par négation de la catastrophe".
Là encore, non, car il y a espoir d'agir. Si catastrophe il doit y avoir, on tente d'en combattre la survenue, on ne reste pas à battre sa coulpe devant l'inéluctabilité de notre condition d'êtres soi-disant marqués par un imaginaire péché originel. Même parmi les chrétiens primitifs, le Pélagianisme, bien que déclaré hérétique par Rome, a trouvé des partisans, curieusement parmi les couches les plus lettrées, sinon les plus instruites, du monde romain finissant. Cet "accès à un autre monde" que vous évoquez en en rappelant la définition: le Paradis, le Nirvana n'est pas à mon avis ce que vous définissez comme "l'espoir (…) d'un événement heureux surajouté à la condition ordinaire". C'est un événement postérieur, en termes de temps qui s'écoule et de transformation de l'être (la mort) à la condition actuelle. Cela dit, je distinguerais, quant à moi, entre la notion de Paradis, peu clairement définie à mon sens, et la notion de Nirvana. Mais ceci est une autre histoire (!)
Point suivant (je résume, en espérant ne pas trahir votre pensée) : la prise de conscience. "mais tu sais bien que ce n'est pas vrai", "l'apparition du doute". Les mystiques chrétiens ont plus d'une fois parlé de "la nuit noire de l'âme". C'est pour moi un concept très fort, car, à ma toute petite échelle, vécu. Il est évident et dirais-je nécessaire que l'être en recherche de connaissance passe par cette épreuve, car sinon, où serait la véritable quête? Cette Nuit Noire oblige à une remise en cause totale, un dépouillement complet de ses certitudes antérieures fondées uniquement sur le "on dit" et sur l'expérience des autres, et pas sur la sienne propre. Là où mon opinion diverge radicalement de celle que vous exprimez, c'est quant à la conclusion qui est tirée de l'existence de ce phénomène: "Pour faire taire cette voix, il faut détruire dans le monde tout ce qui tend à lui donner raison".
Je vais à partir de là, et pour un temps, parler uniquement en mon nom, et non citer l'opinion d'Eliade, donc je m'éloigne peut-être du sujet, veuillez être assez bon pour me le pardonner.
L'hypothèse effectivement horrible que vous évoquez a certes été mise en pratique par certains, et on sait quels actes insoutenables en sont issus. C'est le triomphe de la bêtise, de l'immaturité, de la partie la plus bestiale en l'homme, celle qui lui vient probablement de ses ancêtres simiens dépourvus de bien des défenses accordées par la Nature à ses frères prédateurs. Cette attitude est une régression ontologique extrêmement grave, fatale aussi bien à celui qui la subit qu'à tout ce qui bouge autours! Cette perspective est glaçante, et suscite en même temps une immense tristesse, du moins si on a appris à comprendre son ennemi et ce qui le pousse à agresser… Heureusement et pour le bien de tous, cette attitude n'est pas la seule possibilité qui s'offre à l'homme dans sa quête. Une image parmi d'autres qui surgit dans mon esprit est celle du "pont de l'Epée" qu'on retrouve dans plusieurs versions des romans arthuriens. Lorsque Lancelot doit passer ce pont, constitué d'une lame tranchante "comme un rasoir", la tentation est certainement forte pour le héros de faire demi-tour en se disant : "On se paye ma tête, ou quoi ? Ce n'est pas jouable!". C'est ce qui distinguera le héros véritable de celui qui fera demi-tour. Le Héros acceptera de passer l'épreuve de cette lame qui tranchera ses connaissances incomplètes et/ou erronées, et ensuite seulement s'ouvrira pour lui, non plus le chemin des connaissances, mais le chemin de la Connaissance. Il verra alors le monde dans lequel il se trouve sous son aspect réel, quel qu'il soit, mais en tous cas, il aura écarté le "voile d'Isis" des Alchimistes, et il aura su regarder la Vérité en face. Contrairement au singe primitif ayant dominé l'homme (à rapprocher de l'expression slang désignant les junkies : "avoir un singe sur les épaules"), il n'aura plus besoin de saccager l'univers pour en faire disparaître ce qui le dérange. Bien au contraire, il aura goûté, ici et maintenant, dans son corps d'homme, à la véritable nature des choses, et c'est lui qui en sortira transformé, non le monde qui s'en trouvera dévasté. C'est ce que je tentais de dégager dans mon essai d'essai. Et s'il est un risque de destruction personnelle dans une telle épreuve, au moins le héros l'affrontera-t-il seul, et n'éprouvera-t-il pas le besoin d'entraîner dans sa chute des milliers, voire des millions, d'hommes innocents de ses propres erreurs. Il aura au moins limité les dégâts, même s'il n'a pas abouti dans sa quête.
Reprenons cependant, après cette longue digression!
Les miracles: le Christ lui-même dit de laisser faire. Mais le Christ n'est pas ceux qui interpréteront ses paroles, hélas! S'ils étaient restés fidèles à leurs propres sources, ils auraient agi (les commentateurs et les Pères de l'Eglise) comme leur Maître, et auraient laissé faire. Mais on était dans un contexte de conquête de zone d'influence, et l'erreur qui me semble apparaître dans votre interprétation, c'est de suivre ceux qui ont scindé entre "magie de guérison (ou blanche)" et "magie de destruction" (ou noire). Les Pères de l'Eglise ont bien vu le parti qu'ils avaient à tirer de cette distinction: d'un côté, ils récupéraient les anciens "lieux sacrés", les rebaptisaient selon les noms d'incertains saints chrétiens, s'appropriaient les "Lieux de Pouvoir" (lorsqu'ils ne les détruisaient pas comme étant inassimilables), et jusqu'aux dates des fêtes cycliques (je souligne ce dernier terme), tout en détruisant physiquement l'opposition à leur mainmise plus souvent temporelle que spirituelle! Elle a bon dos, la spiritualité chrétienne, pendant la Reconquista! Je ne développerai pas plus avant, le sujet est connu, et la Sainte Inquisition se trouve, même aux yeux de la Papauté actuelle, tomber sous le coup d'une sentence d'erreur (cf. "Prière de repentance du Pape Jean-Paul II, au nom de l'Eglise catholique. A Rome, le 12 mars 2000 (1er dimanche de Carême)". Je cite : "Seigneur, Dieu de tous les hommes, à certaines époques de l'histoire, croyant servir la foi et la vérité, des fils de l'Eglise se sont laissés emporter par des sentiments d'intolérance et ont commis des actes de violence envers des frères qui professaient d'autres croyances religieuses; pardonne-nous et enseigne-nous la vérité dans la douceur et la charité.").

L'expression" dans la vague de retour du satanisme" est là aussi sinon incorrecte (il y a bien en effet un retour de ces pratiques et/ou convictions) du moins incomplète. Je dirais plutôt qu'on assiste à un retour aux doctrines qualifiées péjorativement de païennes par les chrétiens, qui sont surtout des doctrines archaïques au sens d'Eliade. La notion de "Satan" ou "Chaïtan" ou autre n'a pas sa sources dans les doctrines archaïques. Lorsqu'on "trace le cercle" dans un rituel magique actuel, et quel qu'en soit la finalité, ne se retrouve-t-on pas dans la configuration définie théoriquement par Eliade, et bien matériellement par les grands cercles de mégalithes? L'expression "tracer le cercle de pierres" est d'ailleurs présente explicitement chez Scott Cunningham ("Wicca, a guide for the Solitary Practitioner", Llewelyn Publ.), si ma mémoire ne défaille pas.

Qu'il soit difficile de rencontrer une religion sans composante magique, j'en conviens aisément. Cependant, et d'après ce que rapporte mon autre auteur préféré, A. David-Néel, dans "Mystiques et Magiciens du Tibet", la composante "magique" n'est pas, et de loin, considérée comme fondamentale par les théologiens tibétains de l'époque, mais plutôt comme un "side effect", utilisable et utilisé, de la Voie de connaissance qu'ils suivaient (bouddhiste à la base) et comme une belle impasse pour celui qui s'y engage, au détriment de sa progression personnelle (voir aussi Eliade, "Expérience sensorielle et expérience mystique chez les primitifs"). De cette composante magique, il est évident, aux yeux en tout cas de ceux qui s'intéressent à cette question et avec qui j'ai eu le plaisir de correspondre, qu'elle est majeure dans les sacrements et rituels catholiques (voir aussi "Les mythes du monde moderne" pour le caractère cyclique de l'année liturgique chrétienne). Que la magie soit non-colorée, c'est une évidence pour qui a lu ici ou là quelques ouvrages sur le sujet, de même qu'il me semble évident que le mieux placé pour tuer est le médecin, de par sa connaissance de la constitution et des mécanismes du corps humain (ce n'est pas une attaque contre les médecins, juste un fait d'expérience). Que le rituel donc puisse ensuite orienter cet outil, quel qu'il soit, vers des buts éventuellement très différents est aussi une évidence (Je renvoie à l'ouvrage magistral de Pierre Christian, "Histoire de la Magie" aux éditions Artefact).

Venons-en maintenant à la Bible. Je me suis permis de préciser à quelle traduction et édition je me référais, non qu'elle soit meilleure ou pire qu'une autre, mais simplement parce que c'est la seule que je possède.
La "manip" magique exposée dans l'Exode comporte deux parties: sa préparation et sa réalisation. Et c'est là tout le génie de l'astuce. Alors qu'ailleurs Moïse fulmine contre les mages et le culte des Baals et des Ashtartés (Eliade, je ne sais plus où!), Yahvé, dans sa grande intelligence, dit à Moïse: "Vois, je fais de toi un Dieu pour Pharaon, et Aaron ton frère sera ton prophète" (Exode, 7,1). Ca c'est la préparation, et la notion d'illusion accompagnant cette délégation de pouvoir me semble évidente. Elle est développée dans Exode 4.1 à 4.12, 7.1 à 7.6. La mise en application du plan est relatée dans Exode 7.10 à 7.13 (en ce qui concerne la partie "magique", puis ensuite vient le récit des Plaies). Cette astuce pour faire "passer en force" l'utilisation de la Magie, légitimée pour l'occasion par les ordres divins, est digne de la grande époque des Jésuites. Cet épisode ne contredit donc pas, dans le plan général des ouvrages constituant la Bible actuelle, les anathèmes lancés. Pour employer une image grossière, seuls les flics ont le "permis de tuer"!

L'argument de la nouveauté due à l'apparition d'autres ouvertures et conceptions théologiques ne tient pas non plus, du moins à mes yeux. Ce n'est pas parce qu'un libraire ouvre son échoppe en face de celle de mon libraire habituel que cette dernière prend un caractère de nouveauté pour moi! Ce n'est pas une "néo-librairie" pour autant. Or il en est pour moi des conceptions religieuses comme de tout choix: c'est moi qui l'effectue, pour ma gouverne personnelle, et sans prendre pour argent comptant et en bloc ce qu'exposent les tenants de telle ou telle doctrine, mais bien en faisant mon choix dans les conceptions et idées offertes, de même que je n'achète pas en bloc le stock de mon libraire… Si la parabole indienne des aveugles touchant un éléphant est intéressante, j'en tire personnellement un corollaire : si la vérité est un puzzle dont chacun détient un petit morceau, j'aimerais beaucoup arriver à emprunter chacun de ces morceaux, pour tenter de reconstituer le puzzle. Vaste entreprise...

Sur la Mythologie celtique: je n'ai pas lu l'Histoire des croyances, donc je ne saurais valablement émettre un avis. Mais dans les quelques ouvrages que je possède, il n'est fait allusion à l'Europe occidentale préchrétienne que brièvement, et sans dissertation, dans les dernières pages de "Images et Symboles".

Chute dans la matérialité, chute dans l'Histoire. Pour moi, identité des concepts. L'espace, même pour Eliade, se conçoit difficilement en dehors du concept de durée, et réciproquement. D'où cette assimilation, peut-être pas assez explicitée j'en conviens, mais à mon avis exacte.

La réintégration au Paradis: le temps biblique des origines n'est pas le Paradis, c'est le Jardin d'Eden. A moins que je n'ai loupé un épisode, le Paradis promis par les doctrines judaïstes ou chrétiennes ne fait pas référence à un retour à l'Eden, et c'est logique: ayant accédé malgré l'interdit au fruit de l'arbre de Science, comment l'homme pourrait-il revenir en ce lieu et en ce temps? C'est d'ailleurs à mon avis une bonne explication (dans la logique de ce contexte particulier) de son expulsion. Comme on le dit parfois "On ne saurait faire rentrer un poussin dans sa coquille". L'homme est sorti, selon ces conceptions, de sa coquille, et il ne peut y rentrer. L'Eden lui étant interdit, ces religions lui proposent autre chose. Normal. Voir par ailleurs Eliade, "La Nostalgie du Paradis".

Guérisons et cosmogonie: ça m'ennuie, je suis certain d'avoir lu un passage explicite à ce sujet, mais je n'ai pas réussi à remettre la main dessus. Partie remise ;-)

Le texte auquel vous pensez, en ce qui concerne les rituels égyptiens anciens, est-il la "Déclaration" que fait l'esprit du défunt de n'avoir pas enfreint toute une liste de commandements? Si c'est celui auquel je pense, il est effectivement très beau. Avec la restriction toutefois que le défunt était censé avoir le droit de mentir et d'essayer, à ses risques et périls, de "truander" les Dieux! Très sympa, cette coutume, dont l'humour sous-jacent me plaît bien!

Je ne pense pas non plus que le régime ritualiste archaïque soit ni mécanique ni contraignant, au sens péjoratif du terme, et en le comparant aux religions postérieures. Il était en effet calqué sur des conditions non modifiables de l'environnement et de son fonctionnement, donc complètement inévitables, contrairement aux théories beaucoup plus arbitraires de ce qui a suivi, beaucoup moins appuyées sur le réel de tous les jours, et issues d'esprits certes puissants, mais bien éloignés des préoccupations du paysan moyen (Ais-je dis que parfois je me sens l'âme d'un vieux paysan?).

Merci en tout cas de ce que j'ose prendre pour un compliment :"Vous semblez travailler comme Eliade lui-même". Je n'aurai cependant pas cette prétention! Pourquoi au fait les relations entre ensembles ne seraient-elles pas bijectives? J'avoue que là, je crains de n'avoir pas saisi le fond de votre pensée. Je plaide coupable pour avoir utilisé le terme d'Illusion en ce qui concerne la vision du monde proposée par le Judaïsme. J'aurais effectivement du m'en tenir au terme "le plus bas des modes d'être", qui, cependant, comparé aux hypothétiques splendeurs du monde divin, et même s'il est œuvre de Dieu, ne représente guère plus qu'une illusion. Voir également que dans la Genèse, le fait de nommer les choses et les êtres, tâche accomplie par le premier homme, est l'acte qui les fait tous participer de la réalité. Bien précaire réalité que celle s'appuyant sur l'existence corporelle, fragile et limitée de l'homme. Mais soit, OK sur le principe. Voir néanmoins le message laissé par le soufi Ghazali après sa mort:
"Mon âme est un oiseau, ce corps en est la cage. Je me suis envolé, le laissant comme un signe" (cité par Geneviève Chauvel dans "Saladin"). Toute le caractère non de dualité, mais dual (et non duel) des conceptions précédemment examinées se résume dans ces deux vers.

Enfin, mythe fondateur ou justificatif? La logique historique (et la mienne propre!) voudrait que ni l'un ni l'autre des qualificatifs ne conviennent (entre 2 solutions, toujours choisir la 3ème!). Le paradoxe de la poule et de l'œuf ne se conçoit que dans une évolution sans mécanisme d'itération. Il est probable à mon avis que le mythe ait évolué selon ces deux modalités, se répondant et se renforçant mutuellement, au cours des âges. On évoque une histoire, puis on rejoue cette première histoire, elle devient progressivement plus complexe, on rejoue, etc. Processus d'itération classique et normal. Du moins à mes yeux, évidemment!

De tout cela, il me reste, en gros, l'impression première que j'avais exprimée en début de cette (trop) longue réponse.
Le vécu personnel colore énormément des théories qui touchent à l'idée même que l'homme se fait de son destin. Ici, il s'agit des idées exprimées par Eliade, mais, pour moi du moins, il ne s'agit rien moins que de tenter de comprendre, avec ou sans l'aide d'Eliade ou de quelque autre théoricien. Et cela influe à l'extrême sur ma lecture. Le problème qui se pose à vous en tant qu'universitaire, sans préjuger d'une éventuelle recherche personnelle en ces matières, n'est pas le même, et je puis me permettre des libertés d'interprétation qui, je le conçois bien, pourraient vous être reprochées dans le cadre d'une thèse. Je puis aussi comprendre l'ampleur du travail de recherche, compilation, comparaison et analyse/synthèse personnelle nécessités par une telle entreprise.

Ouf! J'arrive au terme de ce message, et j'ai l'impression de n'avoir qu'à peine effleuré le sujet, ce qui correspond plus que probablement à une réalité bien tangible!
Il y a quand même quelque chose que je trouve éminemment sympathique, c'est d'avoir trouvé, sur ce forum Sceptique, l'occasion que je recherchais de soumettre mes pauvres vues et idées à une critique éclairée. Et ça, c'est inespéré et inappréciable!
Dans l'attente de vous lire, et en vous souhaitant sincèrement de mener à bien votre labeur,
Avec mes amitiés,
Mondreiter


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