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Re:Re:Le « retard » de l'Islam


Re: Re:Le « retard » de l'Islam -- Denis
Posté par Florence , Jul 14,2002,14:03 Index  Forum

Pierre et Denis:
1 – L'avancement de la démocratie.
2 – La séparation de l'Église et de l'État.
3 – La liberté de parole, de la Presse, de religion. La liberté point.
4 – L'égalité des sexes. En particulier le traitement fait aux femmes.
5 – Les institutions, écoles, universités, finances, commerces, industries."

Réalisez-vous qu'il s'agit de préférences, et non de faits ? Vous deux (et la majorité des forumeurs sceptiques, je me doute bien) préfèrent la démocratie, la laïcité, la liberté, l'égalité et la prospérité. Il existe des gens, en nombre, qui dans nos pays même ne souhaitent pas ces conditions (je doute que julien soit un chaud partisan de la laïcité, il n'y a qu'à voir ses positions sur l'enseignement de l'évolution à l'école ...). Vous deux (et d'autres ici) pensez qu'il s'agit de membres du genre des Moroniensis, ils n'en pensent pas mieux de vous (et des autres).

En réponse à vos points, et dans le désordre:


a. La situation concernant ces 5 points ne peut être décrite que comme différente de celle que nous vivons dans nos différents pays, et non inférieure ou supérieure, car

b. le fait que notre situation, dans nos pays, nous semble souhaitable et nous convient ne signifie pas qu'elle le soit pour autrui (ni qu'elle soit fondamentalement si rose que vous voulez la voir pour l'opposer si radicalement à celle des pays musulmans).

c. Parce que l'islam vous fait peur/déplait/est lié au 11 septembre/aux talibans ne justifie ni jugement global et hâtif, ni stéréotypes et généralisations qui semblent tirées tout droit du "manuel du petit colonisateur du XIXè siècle". A lire Pierre, on croirait qu'il a remplacé "japonais" par "islam" dans les hilarants textes bourrés de préjugés que les voyageurs écrivaient à propos de la philosophie japonaise à la même époque (voir "Le Voyage au Japon" par P. Beillevaire, collection Bouquins, Laffont).

d. La séparation église/état est très relative dans nos pays aussi: entre les omniprésentes allusions à la(les) puissance(s) divine(s) de nos politiciens, ou même votre insistance à mettre dans votre argumentation une comparaison entre religions, on peut mesure chaque jour son emprise. Par ailleurs, dans le pays "champion des libertés", il existe toutes sortes de barrières faites aux libres-penseurs et athéistes, qui démontrent bel et bien que la liberté de conscience y est un leurre. Dénoncer plus particulièrement l'islam dans ce domaine relève soit de l'aveuglement, soit de l'hypocrisie.

e. L'état (ou plutôt l'absence) de la démocratie dans une majorité de pays musulmans tient tout essentiellement aux obstacles mis à son développement par les puissances coloniales (et néo-coloniales), qui ont tour à tour soutenu des régimes dictatoriaux, écarté systématiquement les politiciens réformateurs (rien qu'en Iran, pensez au Shah et à Mossadegh - et pour ce qui est de l'Afghanistan, les politicien/nes pro-occidentaux et éduqués ont été systématiquement lâchés aux sbires des talibans dans les camps de réfugiés du Pakistan).
Les dictateurs soutenus par Washington, Paris, Londres ou Ottawa ont commis la même erreur que les USA avec les talibans: ils ont cru pouvoir manipuler les fanatiques. Bush fait de même chaque fois qu'il donne des gages aux fondamentalistes chrétiens aux USA.


f. Idem pour l'état de l'enseignement: aucune puissance coloniale n'a laissé d'institutions d'enseignement supérieur d'un niveau équivalent à ce qui existait en Europe ou aux USA, il est bien entendu que les diplômes décernés par les institutions créées ultérieurement dans ces pays n'ont jamais été et ne seront vraisemblablement jamais reconnus à égalité, les "cerveaux" capables sont appelés systématiquement à étudier dans des centres d'excellence occidentaux (pour bien souvent y être sous-employés), puis encouragés à y rester plutôt qu'aller crééer des pôles d'excellence dans leur pays d'origine, etc., etc.
La situation est pareille dans tous les pays du tiers-monde, islam ou non.

g. pareil pour l'économie et le commerce: les institutions ou ce qu'il en reste, dans la majorité des pays du tiers-monde sont la résultante des conditions bâclées de la décolonisation, de la dictature du besoin des pays occidentaux de se garder un accès bon marché à des ressources de base (pétrole, café, minéraux, voies de communication, ressources halieutiques, etc.). D'où imposition des conditions décrites dans e) et f) et indignation sélective face à des régimes politiques ou religieux tout aussi ignobles, en fonction de ce qu'ils seraient plus ou moins susceptibles de jeter des avions dans les buildings ...


Bref, vous n'êtes pas du tout convaincants sur le fond, et sur la forme, vous vous servez des mêmes artifices que ceux auxquels recourrent tous les "défendeurs de leur propre chapelle" ... ;-)


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