Non, tu ne veux pas comprendre. Je un relativiste en tout, sauf sur le plan épistémologique. Je t’ai déjà dis clairement que je croyais en un monde extérieur indépendant des idées que nous nous faisons sur ce monde.
Je crois juste :
1- Que la science est très éloignée de l’expérience quotidienne, et que le mythe est généralement plus proche.
2- Que la science est souvent très éloignée de l’intuition, alors que le mythe se base largement dessus.
Je n’en tire certainement pas un jugement de valeur sur la supériorité du mythe pour donner une représentation fiable du fonctionnement de la nature : ce serait absurde. Mais j’en tire un jugement sur la supériorité de cette explication mythique dans le rapport que nous entretenons avec elle. Elle est mieux adaptée à notre pensée, à notre expérience, plus naturelle, plus rassurante, et donc à mon sens un facteur d’équilibre et de bien-être.
Que certains gourous exploitent cet aspect à des fins personnelles, et que certains se replient sur le mythe en refusant toute alternative (notamment au niveau médical), est problématique. Mais cela ne remet pas en cause l’ensemble de l’attitude religieuse.
Stéphane : “Et pourtant, je crois que la position sceptique est pourtant simple, Heidegger ou non. On peut d’ailleurs se demander si les réflexions du vieux s’appliquaient non seulement aux tables, mais également aux Juifs, qu’il confiait allégrement au NSDAP.”
Comme c’est petit ! Pfff, attaquer Heidegger sous prétexte que c’était un nazi... Personne n’est parfait, Heidegger pas plus qu’un autre.
Explique-moi en quoi ses actes et ses engagements personnels rendent sa pensée moins intéressante...
Critiquera-t’on aussi les films de Leni Riefensthal sous prétexte qu’elle était la cinéaste officielle du IIIème Reich ? Ou la musique de Carl Orff sous prétexte qu’il composait les musiques des défilés nazis ? Ou l’architecture monumentale de Speer ?
Stéphane : “Cela dit, tu confonds encore la “signification” des objets avec leur “nature”. La première change selon les culture, la seconde, selon la recherche. Si on veut agrafer une signification x à une table, au soleil, ou je ne sais quoi, moi, je n’ai rien contre. Rien de ça ne fera du soleil un trou dans le dôme du ciel.“
Je ne confonds pas, pourquoi t’obstines-tu à vouloir croire que je ne fais pas la différence ? Pour moi même, je fais même une différence très nette, mais c'est uniquement une question de goût, je n'en fais pas un dogme. Je ne vois pas de raison de forcer à faire cette différence ceux qui ne la font pas. Et l’attitude sceptique consiste pour l’essentiel à forcer tout le monde à bien faire la différence et à les persuader que la “nature” est objective et la “signification” subjective. Donc à briser les croyances. Dans ce sens je trouve contradictoire que tu dises que tu n’aies rien contre le fait d’attacher la signification que l’on veut à la table ou au soleil, parce que tu ne te rends pas compte que la démarche sceptique, si elle aboutit, mène à empêcher le croyant d’attacher les significations qu’il veut à ce qu’il veut, et à l’obliger à accepter la vision scientifique du monde.
Il n’y a pas d’alternative, pas de compromis possible. La où l’on a accepté la méthode scientifique, il n’y a plus de place pour la croyance.
Mon propos n’est absolument pas de dire que le mythe nous dit aussi bien que la science comment sont faites les choses, mais de critiquer l’hypocrisie qui consiste à dire “nous n’avons rien contre la foi” tout en faisant tout pour l’éliminer.
G.
“La non-connaissance du vide de toute chose
S’apparente à la trace d’un oiseau dans le ciel.
Ce qui en rien n’existe selon son entité propre
Jamais ne sera la cause d’autre chose.”
(commentaire de Chandrakirti sur la “source de joyaux”)
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